WTF
3 lettres qui signifient littéralement :What’s the fuck, en bon français « c’est quoi ce bordel. Je l’ai déjà avoué ici, j’ai une passion pour le cinéma régressif de Quentin Dupieux. A la sortie de chacun de ses films, je me réjouis à l’idée de passer un moment de folie douce dans une salle obscure. Oui, car Dupieux est fou et j’adore son art du grand n’importe quoi. Fumer fait tousser, Mandibules, Le Daim, Incroyable mais vrai, Au poste !, rien que des comédies foutraques qui me mettent en joie. Alors, bien sûr, je n’allais pas rater ces nouvelles 67 minutes – quasiment un moyen métrage dans le cinéma d’aujourd’hui -, de comédie noire et surprenante. En pleine représentation de la pièce « Le Cocu », un très mauvais boulevard, Yannick se lève et interrompt le spectacle pour reprendre la soirée en main... Un des arguments les plus courts de l’année et c’est parti pour un petit bordel organisé dans un huis clos tourné dans le cocon du célèbre théâtre Dejazet, sur les grands boulevards à Paris. Il faut aimer ce type d’humour totalement déjanté et roule ma poule pour le long métrage le plus court de l’année… et sans doute un des plus dingues.
Ce film a été tourné en secret en six jours, en dehors des rails classiques de production. Dupieux fait un film par an, avec une préparation sur plusieurs mois et une forme de confort. Là, visiblement, il a eu envie de revenir à ses premières amours, c’est-à-dire au film impossible. Il confie : J’ai toujours au fond de moi ce truc qui brûle, ce goût du film qui ne devrait pas exister. Cerise sur le gâteau, le film est accessible gratuitement à toutes les personnes qui portent le prénom de Yannick ! Contrairement à la plupart des films de Quentin Dupieux, Yannick ne repose pas sur un élément absurde ou fantastique. Là encore, le réalisateur nous dit : J’ai tellement fait de films qui reposent sur des principes absurdes avec des pirouettes et des jeux temporels que ça devenait soudain surprenant d’en réaliser un dans lequel il n’y avait pas tout ça. Comique de situation, dialogues hilarants – de la Baltique -, et casting en folie… Une réflexion féroce sur la création, l’art du spectacle, la relation au public, le mépris de classe et ce grain de folie qui germe en chacun de nous… Dupieux le misanthrope est au top de sa forme.
Comme Hazanavicius dans Coupez ! , Quentin Dupieux fait d’abord jouer faux ses acteurs pour préparer un renversement du point de vue. Avec ce stratagème, Raphaël Quenard, - de plus en plus surprenant et qui s’affirme de film en film comme un de nos comédiens les plus précieux -, Pio Marmaï, énorme, Blanche Gardin, Sébastien Chassagne, Agnès Hurstel, se régalent de bout en bout en parodiant leur propre métier d’acteur… Du théâtre dans le théâtre. Du nanan à un bémol près, la fin bâclée et pour le moins ambiguë.