Au pays du bonheur national brut
107 minutes de plongée au Bouthan ? Ça ne se refuse pas. Surtout quand elles sont filmées par l’indo-japonais Pawo Choyning Dorji qui, il y a deux ans, nous avait enchantés avec son Ecole du bout du monde. Nouvel émerveillement devant la splendeur des paysages et l’art de vivre tout en douceur de ce peuple pas comme les autres. 2006. Le Bhoutan s’ouvre à la modernisation et découvre Internet, la télévision... et la démocratie. Pour apprendre à son peuple à voter, le gouvernement organise des « élections blanches ». Mais dans le pays du Bonheur National Brut, où la religion et le Roi importent plus que la politique, les habitants semblent peu motivés. Cependant, dans une province montagneuse reculée, un moine décide d’organiser une mystérieuse cérémonie le jour du vote et charge l’un de ses disciples de trouver un fusil... Grâce à ce film, le pays du bonheur national brut dévoile un peu plus certains de ses secrets. Une pépite venue d’ailleurs.
Conte, fable, parabole ? Oui, il y a de tout cela dans cette comédie mais il ne faut jamais oublier que les événements relatés sont réels. La démocratie, ça s’apprend et tout est encore plus compliqué dans un pays qui a vécu pendant des siècles et des siècles éloigné des vicissitudes et des contraintes du reste du monde. On voit bien, - hélas, oserais-je dire -, la pénétration du monde moderne et surtout ses conséquences délétères, dans les quelques plans tournés dans la capitale Thimphu, fort de ses 115 000 habitants dont le mode vie semble à des années lumières du reste du pays. Loin de cette agitation, la vie des villageois s’organisent tranquillement entre élevage, tradition et religion. On voit qu’une bonne partie de l’histoire qui nous est racontée est centrée autour d’un stupa bouddique. L’affrontement – très feutré – entre la capitale et les campagnes nous montre que là, comme partout ailleurs, l’opposition entre les élites et le peuple. Ce qui aurait pu donner un film sévère donne ici une comédie tendrement drôle d’un pays qui adopte par nécessité des fonctionnements qui lui sont étrangers, sans révolte, mais en y intégrant ses propres codes, ses propres rituels, sa propre culture. Réjouissant.
Je ne m’attarderais pas sur les noms présents au casting, les Tandin Wangchuk, Kelsang Choejay, Deki Lhamo, que vous oublierez très vite. Ce ne sont pas des professionnels et sont souvent maladroits à jouer la comédie. Mais on leur pardonne bien volontiers tant ils nous font passer un moment délicieux, même s’il est sans doute un peu longuet et répétitif. Je ne regrette qu’une chose, c’est cette fin digne de Disney où tout le monde est content, car la démocratie a du bon et les torts sont oubliés pour peu que l’on ait bon cœur… Un peu réducteur par rapport au message délivré par cette belle histoire.