Si la logique existe, il n'y a aucune raison que Leurs enfants après eux ne connaisse pas un succès comparable à L'amour ouf, tellement on peut y déceler des points communs : la durée, l'aspect social, un amour contrarié, les ellipses temporelles, sans parler de Gilles Lellouche, lequel, pas à la réalisation mais dans un second rôle poignant surpasse largement les autres interprètes du film, bien que Ludivine Sagnier, Angela Woreth et Sayyide El Alami, entre autres, soient des plus convaincants (un bémol pour Paul Kircher, au jeu inégal). Pour les cinéastes, Ludovic et Zoran Boukherma, c'est évidemment un sacré virage, eux qui avaient réussi leurs premiers films de genre, mais leur maîtrise du romanesque n'est finalement pas une surprise. Du livre éponyme de Nicolas Mathieu, Goncourt 2018; on pouvait lire ceci, en quatrième de couverture : "Nicolas Mathieu écrit le roman d’une vallée, d’une époque, de l’adolescence, le récit politique d’une jeunesse qui doit trouver sa voie dans un monde qui meurt. Quatre étés, quatre moments des années 90 pour raconter des vies à toute vitesse dans cette France de l’entre-deux." Dans son adaptation plus que fidèle, le film respecte la trame et le décor de l'ouvrage et même si le style de l'auteur ne se retrouve pas vraiment à l'écran, les deux frères réalisateurs inventent leur équivalent, dans une mise en scène sobre mais parfois éruptive, dans une mélancolie prégnante et une B.O très présente (trop ?), capable du plus grand écart, d'Aerosmith à Cabrel. C'est sur la longueur que Leurs enfants après eux gagne son pari de fresque habitée, avec les désillusions qui priment, dans cette vallée de larmes.