Réalisateur sans grand talent, Stanley Kramer (qui a néanmoins signé une honnête comédie avec Devine qui vient dîner ) s’est risqué là à tourner un film à grand spectacle, ainsi que l’on disait alors. Mal lui en a pris. Malgré trois célébrités, des milliers de figurant et un gros paquet de dollars, ce film puéril et souvent franchement ridicule se traîne lamentablement pendant 140 mn, avec pour fil conducteur une centaine d’espagnols dépenaillés et quelques mules traversant l’Espagne à la course avec un canon géant, arme fatale supposée de l’époque et ancêtre de la grosse Bertha. On a droit aux moulins à vent, comme ceux qu’attaquait Don Quichotte, à un début de corrida, à un rejoneador virevoltant sur son cheval, à un âne minuscule choisi pour monture à Cary Grant (qu’allait-il faire dans cette galère ?), à une procession de Semaine Sainte avec pénitents encagoulés, et même au son des castagnettes. Aucun doute, on est bien en Espagne. Pour le reste, les insurgés sont pauvres mais fiers, les militaires français stupides et régulièrement taillés en pièces, dans leurs uniformes tous d’un modèle standard, sans doute achetés au prix de gros, les chevaux faméliques et les morts par milliers. Cependant, dans ce genre-là, Cecil B. De Mille ou Sacha Guitry avaient fait beaucoup mieux et surtout de façon plus crédible. Et puisque rien ne nous sera épargné, Sophia Loren, toujours précédée de son célèbre gaillard d’avant, file de temps à autre le parfait amour avec Cary Grant, qui doit bien regretter Hitchcock (La main au collet) et attendre avec impatience Stanley Donen (Charade), sous le regard abruti du protégé de la mafia, Frank Sinatra. On l’aura compris, c’est très copieux, très indigeste et à éviter absolument.