Portrait d’un « gentil ».
Je suis les frères Arnaud et Jean-Marie Larrieu depuis 2008 et Le voyage aux Pyrénées. Depuis, ils m’ont toujours enchanté avec leur manière bien à eux de regarder et filmer notre monde et ses habitants. Pour ces 101 minutes, alors que tous leurs films se situaient dans les Pyrénées, leur région natale, ils ont changé de massif pour nous transporter dans le Jura. Aymeric retrouve Florence, une ancienne collègue de travail, au hasard d’une soirée à Saint-Claude dans le Haut-Jura. Elle est enceinte de six mois et célibataire. Quand Jim nait, Aymeric est là. Ils passent de belles années ensemble, jusqu'au jour où Christophe, le père naturel de Jim, débarque... Ça pourrait être le début d’un mélo, c’est aussi le début d’une odyssée de la paternité. C’est sans doute leur meilleur film à ce jour. C’est aussi mon plus beau moment de cinéma depuis longtemps.
Il s’agit de l’adaptation du livre éponyme de Pierric Bailly sorti en mars 2021. C’est l’auteur lui-même, qui a fait parvenir son roman aux frères Larrieu parce qu’il appréciait beaucoup leurs films et pensait qu’ils pourraient le transposer à l’écran. Et comment ! Avant de se lancer dans ce film, les Larrieu travaillaient sur un western, le mélo n’étant a priori pas vraiment leur genre de prédilection. Sans effets de manche, les cinéastes savent porter l’émotion à son comble devant cette histoire de paternité contrariée. Cette façon de si bien parler de la vie et des gens est une rareté. On y croit de bout en bout parce que les personnages existent intensément. Pudeur, humour et délicatesse sont les maîtres mots de ce chez d’œuvre d’émotion pure. Et cette fois-ci, la voix off – procédé que je n’apprécie guère d’habitude – ajoute à l’émotion. Un des plus beaux films de l’année.
Une fois de plus, les larrieu prouve que ce sont d’excellents directeurs d’acteurs et d’actrices. Ils ont une manière bien à eux de les faire jouer, mais à chaque fois, c’est un ravissement. Karim Leklou, excellent encore une fois, a un physique atypique et une présence quasi expressionniste, tel un acteur de l’époque du muet. Un acteur qui n’en finit pas de monter. Laetitia Dosch et Sara Giraudeau sont formidables comme jamais. Bertrand Belin, avant de « faire » l’acteur, est surtout musicien et c’est lui qui signe la bande son du film. Ajoutons Noée Abita qui, à 25 ans a déjà une copieuse filmographie – commencée en 2017 avec Ava -, dans laquelle il n’y a rien à jeter, preuve qu’elle sait choisir ses rôles et les « deux Jim », Eol Personne et Andranic Manet. Vous avez compris… incontournable. Faites un triomphe à ce « roman de Jim » des Frères Larrieu qui, pour la 1ère fois abandonne leur grain de folie coutumier, prouvant que l’anodin n’est pas forcément l’insipide. Bravo !!!