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Fiers R.
98 abonnés
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3,5
Publiée le 12 avril 2024
Si on ne fouillait pas un tant soit peu sur le Web, curieux de voir la genèse et les fondements de ce film atypique, on se croirait revenu au temps de l’une des opérations marketing les plus réussies et dingues que le cinéma ait connu. Et c’était pour un film horrifique également, on parle bien sûr du cultissime « Le projet Blair Witch ». Le marketing initial laissait croire aux rushs retrouvés par hasard d’un véritable reportage réalisé par un trio de jeunes morts et disparus depuis à propos d’une sorcière et du folklore qui l’entourait. On connaît la suite : un buzz monumental qui a fonctionné comme jamais, les spectateurs croyant majoritairement à la véracité de ce qu’ils voyaient (on était en 1999, aux balbutiements de l’Internet) et le film avait rapporté 250 M$ (hors inflation) soit l’équivalent d’un « Dune » aujourd’hui!
Sorti en catimini et couronné de succès (le film marche très bien aux USA actuellement) tout en étant précédé d’une réputation sulfureuse mais qualitative, « Late Night with the Devil » entend revenir sur les coulisses d’un talk-show américain de fin de soirée à la fin des années 70 qui avait pour thème l’occulte. En particulier, une émission qui a mal tourné le soir d’Halloween avec phénomènes paranormaux et morts à la clé. Une fois dans la salle, lorsque le film commence et qu’on nous contextualise l’époque, l’émission et les différents protagonistes de cette affaire (tout cela de manière concise et ultra efficace), on pourrait croire que tout cela est vraiment arrivé et qu’on a juste retourné tout cela pour le cinéma. Une fois sorti de la salle, la fin étant bonne mais bien trop grand-guignolesque et improbable pour s’être vraiment déroulée, on comprend qu’on n’est pas devant quelque chose de véridique. Non, c’est surprenant mais on est plutôt face à un sous-genre rare et cousin du documentaire : le documenteur. Et dans ce registre délicat, « Late Night with the Devil » est une excellente surprise maîtrisée de bout en bout. Un peu comme l’était le film norvégien « Troll Hunter » et sa prétendue véritable chasse aux trolls.
Sur une heure et vingt minutes, une fois l’introduction posée, on assiste donc à la retransmission de cette émission, on voit ses coulisses et on nous présente son animateur phare incarné par un abonné aux seconds rôles qui a enfin l’occasion de briller ici : David Dastmalchian (vu dans « The Suicide Squad », le magistral second volet, pas la première grosse daube). Le film prend son temps pour faire monter la tension mais en attendant c’est loin d’être déplaisant : les frères Cairnes, cinéastes australiens dont les deux précédents opus sont restés inédits hors de leur pays, nous plongent dans l’atmosphère rétro et vintage de ses vieilles émissions du siècle passé. Grain de l’image, costumes et coutumes télévisuelles de l’époque sont délectables ici et bien rendues. Puis, comme dans un bon film d’horreur, l’étrange s’incruste petit à petit et de plus en plus sur le tournage jusqu’à la ligne droite finale bien exécutée à défaut d’être véritablement effrayante.
Comme dit plus haut, on y croirait presque jusque l’épilogue, très bien mais un peu too much pour être potentiellement réaliste. De mettre face à face, des croyants (le public et la parapsychologue), des sceptiques (le médium ami des Warren de la saga « The Conjuring ») et des personnes davantage neutres (le présentateur et son producteur) est une gageure et permet de mettre face à face divers points de vue sur les faits. Et, l’air de rien « Late Niht with the Devil » déconstruit intelligemment tout un pan du cinéma d’épouvante à tendance satanique de l’époque et nous immerge dans certains modes de l’époque entre cultes, sectes et délires sataniques. En somme, un film peu commun et rare, qui intrigue et amuse à la fois tout en assumant parfaitement sa proposition maligne de A à Z. Une bonne petite surprise!
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