Lointain est le temps où Zhang Yimou enchantait avec ses premières réalisations, enchaînant Le sorgho rouge, Ju Dou et Épouses et concubines, entre autres. Si le cinéaste chinois est toujours aussi actif, plusieurs de ses films récents restant inédits, il n'a pas perdu la main, loin s'en faut, mais il est aussi rentré dans le rang des bons élèves, avec des accents nationalistes un peu embarrassants. Comme dans Full River Red, par exemple, énorme succès au Box Office, qui en appelle à une Chine unifiée, avec tous les sous-entendus hégémoniques actuels, qui paraissent évidents. A part cela, Full River Red est un divertissement haut de gamme, plus facile à suivre que certaines de ses dernières œuvres et qui réussit à conjuguer comédie débridée et action, avec un brio incontestable, au sein d'une intrigue historique qu'il sait rendre épique par sa mise en scène chatoyante et son esthétique affirmée. Le peu de décors n'est pas un frein au lyrisme et à l'emphase, bien au contraire, et l'on pense fatalement au théâtre de Shakespeare mais surtout à Kurosawa, l'un des maîtres de Zhang. Avec sa bande sonore qui use parfois de morceaux de rap chinois, incongrus, ses rebondissements multiples, sa cruauté sanglante et parfois sa tendresse pour la pureté de ses héros, Full River Red décrit une Chine du XIIe siècle pleine de bruit, de fureur, de trahisons et de crimes. On en oublierait facilement le message politique quand le spectacle est d'une telle intensité.