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    The Survival Of Kindness
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "The Survival Of Kindness" et de son tournage !

    Contexte pandémique

    Début 2020, Rolf de Heer finalisait le financement d'un long métrage en développement depuis une dizaine d'années : un projet dont l'histoire contemporaine était parallèle à celle de l'impact dévastateur de la colonisation sur les premiers peuples d'Australie. Basé sur des faits réels, son sujet était extrêmement sombre et son tournage présentait des défis logistiques importants, car nécessitant une équipe de taille et de nombreux acteurs qui auraient parcouru de grandes distances dans des conditions extrêmes.

    Le film avait attiré des investissements de la part de la France et de l'Italie, deux pays devenus, début 2020, la ligne de front de la pandémie. Le financement fut mis en attente, alors que l'industrie cinématographique mondiale tentait de définir son avenir. L’Australie a fermé ses frontières et la communauté indigène, avec laquelle le film devait être tourné, en a fait de même. À l'extrême sud de la Tasmanie, un cinéaste a passé une longue période de confinement à réfléchir à l'avenir du cinéma.

    Un autre film devait être réalisé, mais tout allait devoir être différent du projet initial. Il faudrait désormais prendre en compte les contraintes liées au COVID 19 : petite équipe, petit casting, principalement en extérieur et accessible. Le budget devait être faible, les conditions de financement étant, à ce stade, pour le moins précaires. En l'absence d'idées séduisantes correspondant au modèle désormais établi, il sembla judicieux à Rolf de Heer de commencer par réfléchir aux lieux de tournage de ce long métrage.

    Naissance du projet

    Rolf De Heer a donc commencé des expéditions quotidiennes sur les sentiers de randonnée qui entourent le Kunanyi (mont Wellington), à un peu plus d'une heure de route de sa maison au sud de Hobart. Son but : trouver la beauté et l'inspiration sur le Kunanyi, et des lieux cinématographiques intéressants (parfois uniques et étranges) sur différentes parties de la montagne... Un film a commencé à prendre une forme floue avec un recueil de lieux, sans qu'il y ait encore de scènes pour les habiter.

    "Au même moment que le COVID, le mouvement Black Lives Matter explosait à travers le monde. En Australie, nous avions notre propre sous-branche, je suppose. Tout cela se passait en arrière-plan, mais je n'essayais pas de le mettre dans le film. Puis, un jour, en me rendant à la montagne à Kunanyi, une image m'est venue à l'esprit, qui exigeait d'être le plan d'ouverture du film. C'était une image de Peter Djigirr enfermé dans une cage sur une caravane abandonnée dans le désert", confie le cinéaste. Il ajoute :

    "Il s’agit de mon ami indigène le plus proche, avec qui nous avons travaillé ensemble sur deux films... Il a coréalisé 10 canoës et coproduit Charlie's Country, et il a joué dans les deux... Je le connais très bien, je connais la façon dont il marche, à quel point ses yeux sont expressifs et pourtant énigmatiques, et à quel point son humour peut le rendre léger. L'image que j'avais en tête était très spécifique, propre à lui et à l'endroit où elle se trouvait, un banc d’argile dans le désert de dunes rouges d'Australie du Sud."

    Une seule image

    De nombreux films de Rolf De Heer sont nés ou ont évolué à partir d'une image : la time-lapse d'étoiles (Epsilon), la photo en noir et blanc de dix hommes indigènes australiens debout sur leurs canoës d'écorce dans le marécage (10 canoës), ou l'image d'une femme parlant à une caméra vidéo dans sa propre maison (Alexandra's Project) : "Cette image de Djigirr dans la cage... Je ne pouvais pas y échapper, je ne pouvais pas m'en débarrasser... Elle voulait être le début du film, le début littéral mais aussi le début métaphorique, ce dont le film allait parler. Même si je ne savais pas pourquoi le personnage avait été enfermé, cela résumait en quelque sorte tout le film."

    "Mais ce banc d’argile aride était bien loin du vert luxuriant des montagnes, en particulier du Kunanyi, en Tasmanie. L’endroit idéal était à plus de 1 500 km, dans le désert d'Australie méridionale. J'ai alors pensé qu'il devait s'agir d'un film-voyage, et que ce voyage commencerait dans le désert en Australie du Sud, et mènerait le personnage jusqu'à la montagne, en Tasmanie, bien qu’au moment où l'image m'est parvenue, aucun lieu et aucun moment n’étaient spécifiques. Et bien que Djigirr n'ait finalement pas été disponible pour faire le film, j'étais convaincu qu'il y avait là un film, un film que je voulais faire parce que c'était un film que je voulais voir", se rappelle le metteur en scène.

    Ecriture du scénario et lieux de tournage

    Les inspirations résultant des repérages en Australie-Méridionale ont défini la façon dont le scénario a été abordé : "Au lieu d'écrire ce que j'avais dans la tête et de trouver les lieux qui convenaient, j'ai trouvé des lieux qui m'intéressaient d'un point de vue cinématographique, qui me suggéraient ce qui pourrait s'y dérouler. Et comme le film était alors pour moi le voyage d'un personnage d'un point à un autre, et comme je connaissais le personnage, je pouvais créer des scènes qui me semblaient convenir au film à partir des lieux, je pouvais laisser l'atmosphère d'un lieu déterminer ce qui s'y passerait dans l'histoire."

    Au fur et à mesure que les lieux de tournage étaient trouvés, l’univers de l'histoire, et donc l'histoire elle-même, se développaient. Le réalisateur Rolf De Heer poursuit : "Tous les éléments fondamentaux du film, comme le fait que la plupart des personnages du film ne se comprennent pas entre eux, qu'il n'y ait pas de dialogue intelligible dans le film, ont évolué au fur et à mesure que je trouvais des lieux de tournage". Parfois, il fallait trouver des endroits spécifiques, comme la transition entre l'ambiance désertique de l'Australie du Sud et l'ambiance plus luxuriante et montagneuse de la Tasmanie.

    Le choix s'est finalement porté sur le site de Stony Gorge, qui permettait de modifier sans heurt la nature de la topographie. Mais cet endroit en lui-même évoquait plusieurs scènes dans différentes parties, et il est ainsi devenu plus qu’un lieu de transition. De retour en Tasmanie et armé de centaines de photos des lieux de tournage, Rolf a commencé à écrire un scénario qui raconterait l'histoire dans ses moindres détails. L'époque à laquelle le scénario a été écrit a profondément imprégné l'ensemble du processus. C'était l'intersection, voire la collision, entre Black Lives Matter (BLM) et la pandémie de COVID-19.

    Qui pour le personnage principal ?

    Peter Djigirr, l'acteur fétiche de Rolf De Heer, ne pouvant faire le film, l’enjeu principal était de trouver quelqu’un d’autre. "En essayant de trouver quelqu'un, je suis tombé sur cette femme éthiopienne qui travaillait dans un centre de réfugiés. En leur parlant, j'ai dit : 'Je veux un homme, comme cette femme'. Et je me suis demandé : 'Pourquoi pas cette femme ?' Mais quand je lui ai demandé, elle a refusé. Elle sortait d'une situation traumatisante et était très heureuse d'avoir été acceptée comme réfugiée en Australie. Elle ne voulait rien changer. Mais pour moi et ma coproductrice Julie Byrne, après avoir pensé au rôle principal en tant que personnage féminin, nous ne pouvions plus revenir en arrière."

    "J'ai compris, en particulier après avoir travaillé avec des autochtones qui n’étaient pas acteurs, que si une personne convient à un rôle et a de la profondeur, vous pouvez mettre la caméra sur elle et la garder. Et ce sera intéressant. Si vous choisissez bien la personne, vous pouvez être sûr que la caméra le verra. Lorsque j'ai choisi Mwajemi, je savais qu'elle avait une grande expérience de la vie, avec toutes les brutalités qu’elle a vécu et qui se sont produites autour d'elle. C'est là, dans son être. Vous placez la caméra sur elle et, si vous en avez parlé au préalable et si elle a la liberté de penser qui va avec, elle vous donnera quelque chose d'intéressant.", se rappelle le metteur en scène.

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