Des noirceurs de l’âme humaine
Personne n’a pu oublier l’extraordinaire Jusqu’à la garde de 2018, et ses 10 récompenses dont 4 César. Ce que certains ont pu oublier, c’est le nom du cinéaste : Xavier Legrand. Il revient sur les écrans avec ces 112 minutes de thriller éprouvantes mais qui auraient dû éviter certains travers fort gênants. Heureux et accompli, Ellias devient le nouveau directeur artistique d’une célèbre maison de Haute Couture française. Quand il apprend que son père, qu’il ne voit plus depuis de nombreuses années, vient de mourir d’une crise cardiaque, Ellias se rend au Québec pour régler la succession. Le jeune créateur va découvrir qu’il a hérité de bien pire que du cœur fragile de son père. Glaçant mais frustrant car, hélas, invraisemblable. Quel dommage, car Legrand a vraiment du talent !
Le premier long métrage de notre cinéaste du jour, abordait le sujet des violences conjugales. En prolongement celui-ci creuse le sillon du patriarcat. Ici, c’est de « la violence des hommes » dont il est question avant tout. Mais cette « violence faite aux femmes » écrase également les hommes, les pères, les fils. On le voit, les intentions sont nobles mais, hélas – je me répète – ce film noir, ce conte d’épouvante, cette parabole tragique, ce thriller anxiogène, - les qualificatifs ne manquent pas -, m’a perdu dès le moment où le « héros » accumule les réactions étranges, incompréhensibles, incohérentes. Même si le personnage central se retrouve déraciné par l’isolement dans un univers qui n’est pas le sien, cela n’explique pas toutes ses errances. Pourtant, l’idée du labyrinthe initial, au sein duquel il triomphe, était une splendide, augurant, à la façon de celui de Dante, celui dans lequel il va se retrouver malgré lui, prisonnier. Et là, on pense à Kubrick ou à Hitchcock. Mais seulement pour ce cadre angoissant car, pour le reste… notre « héros » malgré lui n’assure pas, ne gère pas, est envahi par la trouille, submergé par la crainte, et perd totalement les pédales… Est-ce plausible ? Je crains que non. Et c’est bien là que le bât blesse. J’aurai tant voulu aimer ce film.
Le canadien Marc-André Grondin n’a que 40 ans et pourtant une filmographie pléthorique derrière lui. Ici, on ne peut que regretter qu’il en soit réduit à beaucoup pleurer, beaucoup hurler, à friser l’hystérie en permanence. C’est fatigant, épuisant, et contreproductif. A ses côtés, belle prestation – sobre celle-là - de Yves Jacques. Les autres ne sont que des silhouettes. Plus qu’un thriller, c’est le portrait d’un homme en pleine déroute morale et psychique. Scénario bancal – c’est une litote -, mise en scène grandiloquente, interprétation chargée voire grotesque… une grosse déception.