Chattahoochee est un film avant tout engagé, avec un message fort, mais il n’en délaisse pas pour autant une certaine esthétique, académique sans nul doute et perfectible, mais pas vilaine.
Le film propose en effet un travail formel classique pour un film de ce genre, mais élégant. Je rejoins la critique précédente sur le soin apporté à la lumière, étonnement chaude pour un film froid ; à la mise en scène, qui bien qu’un peu lisse reste très convenable comme en témoigne la scène d’ouverture ; et à la reconstitution qui, avec les limites inhérentes d’un budget que l’on imagine restreint cherche l’authenticité, la véracité et réussit en la matière à virer parfois vers le docu-fiction. La musique reste en retrait, voire est un poil décevante, mais le métrage ne manque pas d’allure, quoiqu’il aurait peut-être mérité d’être plus typé, plus puissant, surtout compte tenu d’un casting qui tire Chattahoochee du téléfilm de luxe, à l’évidence.
Le casting est en effet très soigné. De bons seconds rôles comme Emmet Walsh ou Ned Beatty, et des premiers rôles pointus, avec un Gary Oldman somme toute bienvenu dans ce genre de personnage. Il campe ce héros traumatisé avec la finesse qui lui est habituelle, et tant mieux car c’est le personnage qui peut vite virer au n’importe quoi ! Il est entouré d’acteurs de prestige comme Dennis Hopper ou Frances McDormand. Un beau casting qui fait du bon boulot, sans toutefois que les rôles soient toujours aussi dégrossis qu’on pouvait l’espérer. Compte tenu de l’approche du métrage, forcément il y a un côté un peu caricatural dans les personnages, on peut regretter ce manque de finesse, mais c’est aussi ce qui fait la puissance de ce métrage, dénonciateur d’un système oppressif plus que médical.
En effet Chattahoochee s’attaque à un sujet grave, celui des asiles psychiatriques au lendemain de la Guerre du Vietnam et des traitements peu médicaux de ces établissements. Sujet grave qui est abordé ici à la fois de façon directe, un peu caricaturale et manichéenne sans nul doute, et en même temps qui manque un peu de virulence. Visuellement le film se veut très discret, très soft, et cette recherche de l’implicite ou du hors-champ a de quoi surprendre. Ça crée une rupture bizarre avec les intentions affichées sur le papier. Après sur un rythme honorable le métrage n’ennuie pas, mais je l’ai trouvé tout de même un peu trop linéaire, manquant de gros morceaux de bravoure.
Pour ma part ce métrage méconnu mérite la découverte, surtout si le sujet vous intéresse ainsi que le casting. A mon sens ça reste un téléfilm élégant et intéressant, sans doute trop classique et un peu plat. 3