« The Hanging Tree » (La colline des potences, titre au pluriel abusif) est peut être le film le plus ambitieux de Delmer Daves. Mélodrame camouflé sous la forme d’un western plus dur que pur. Dur car le personnage principal, ambigu, désabusé est peu enclin au pardon. Peu pur car il fait face à un prêcheur assoiffé de sang, et un jaloux frustré qui ne dépare pas une bande de chercheurs d’or prêts à réduire la concurrence au moindre prétexte, à l’aide de meurtre par balles ou par pendaison, l’arbre du même nom devenant par la même occasion leur totem. Cette synthèse du pan affairiste impitoyable de la société américaine et du comportement qui en découle, sert de base à des actions peu reluisantes quant aux bassesses et refoulements qui se libèrent dans ces lynchages, caractéristiques d’une pseudo justice dont toute morale est absente. Après « Man of the West » (L‘homme de l’Ouest) d’Anthony Mann réalisé un an auparavant, Gary Cooper incarne un personnage tout aussi antipathique. Taciturne, cassant et glacial, traînant un passé douloureux qu’il ne révèlera que dans le dernier quart du film le Dr Joseph Frail dépouille cette brochette peu reluisante grâce à son talent de joueur de poker émérite. Mais contrairement au film de Mann, Daves prête une morale à son « héros ». Il recueille et soigne un jeune voleur, le sauvant du lynchage, donne gratuitement des consultations au plus démunis et soigne et héberge une blessée, temporairement aveugle, dont il s’éprend sans jamais le lui révélé. Cette morale, alliée à, la magie de paysages bucoliques (collines, rivière) apportent un côté rousseauiste proche de « Broken Arrow » (La flèche brisée) le film le plus connu du réalisateur. Grace à un casting remarquablement dirigé, dominé par Gary Cooper (deux ans avant sa mort), Maria Schell juste à chaque instant, et Karl Malden épatant méchant, une réalisation souvent brillante avec des plans stupéfiants, surtout vers la fin du film et l’excellente musique de Max Steiner, «La colline des potences » est avec « 3h10 pour Yuma » et « La dernière caravane » le sommet de l’œuvre westernienne de Delmer Daves. Ce qui n’est pas rien, le cinéaste étant souvent considéré comme faisant partie du quatuor princier du genre, avec Anthony Mann, John Sturges et Sam Peckinpah (le « royal » étant composé de John Ford, Howard Hawks et Raoul Walsh). C’est dire la qualité et l’importance de cet excellent film.