Le Vourdalak est un film d’horreur français, voilà une bonne surprise déjà ! Maintenant, faut que je le dise, quand le film commence, je suis inquiet. On sent le manque de budget, le jeu des comédiens est dominé par des dialogues déclamés très théâtraux, visuellement la photographie est assez neutre, les décors ne font pas du tout Europe de l’Est, lieu théorique de l’action, bref, on se dit que c’est mal barré. Reste le nom de Tolstoï au générique, le sujet exotique et peut-être l’espoir d’une montée en puissance. Celle-ci vient en effet, et finalement, passé le premier quart d’heure un peu pénible, on se retrouve avec un métrage très sympathique. Oui c’est fauché, oui le jeu des acteurs rappellera la bonne époque de Jean Rollin, mais il y a un style, une personnalité dans ce métrage. Il y a d’excellentes idées de mise en scène qui transcendent le budget et le manque de décors orientaux. Vraiment, le film arrive à créer une atmosphère et à développer des scènes inquiétantes avec peu de moyens, juste par les cadrages, l’éclairage, mais encore les sonorités. Notons d’ailleurs, au passage, l’excellente bande son du métrage. Le film lorgne aussi souvent vers le bizarre, l’intrigant, jusqu’au surréalisme et même l’absurde, avec ce marquis hyper maquillé aux manières surjouées, ces éléments grand-guignolesques amenés sur un ton quasi-comique qui pourront rappeler les premiers Evil Dead, ce qui lui donne une tonalité singulière. Cela, d’autant que le film assume un côté à l’ancienne, limite surannée dans son approche de l’horreur, et on en vient là au sommet du film : le vourdalak ! Ouah ! Je n’avais plus vu une créature aussi impressionnante depuis longtemps. Elle a une présence physique, palpable, et quel design ! Elle est totalement inquiétante, impressionnante, effrayante, et en même temps, sa voix (celle du réalisateur et tellement bien choisie), douce, posée, semblant venir d’outre-tombe car décorrélée de sa bouche renchérit son côté machiavélique. Dès que la créature fait son apparition (et la première fois ça marque !), on bascule dans le meilleur du film, et chacune de ses apparitions est hyper attendue tant elles sont spectaculaires. Quel super idée d’avoir choisi l’animation physique pour cette créature, comme dans Gueules noires mais en beaucoup plus maîtrisé. Elle fait vraiment peur !
Enfin, l’histoire est excellente. Simple, efficace, elle s’inspire d’une œuvre de Tolstoï, valeur sûre. Le métrage est court, il ne cherche pas à en faire des caisses, il va à l’essentiel et déploie une intrigue tragique originale autour du mythe vampirique. Du début à la fin, on passe un bon moment, et si j’avais peur de temps morts, le film arrive toujours à nous livrer une petite surprise pour l’éviter.
Bref, Le Vourdalak est un film fauché, mais si vous arrivez à ne pas vous concentrer sur les lacunes liées à ce manque de moyens, si vous arrivez à supporter le jeu des acteurs souvent théâtral (probablement voulu par fidélité au texte original de Tolstoï), vous passerez un très bon moment. Ce film d’horreur à l’ancienne est une jolie réussite, très plaisante dans le paysage du cinéma de genre français. 4