A vu « Je le jure » de Samuel Theis. Après le magnifique « Party Girl » et « Petite nature », le réalisateur ancre à nouveau son film dans les Vosges dont il est originaire, dont il connait les paysages, les coutumes, les lumières, les gueules. Fabio (Julien Ernwein) est au chômage, se laisse porter par les non-évènements, a du mal avec les mots et les sentiments et a bientôt la quarantaine. Il vit avec Marie (magnifique et émouvante Marie Masala) qui pourrait être sa mère, une relation un peu bancale. Un jour, il est désigné pour être Juré d’assise pour une affaire d’homicide concernant un jeune homme pyromane (Souleymane Cissé troublant) totalement en marge de la société. Fabio va fréquenter le milieu judiciaire qu’il ne connait pas et d’autres jurés issus d’une autre classe sociale que la sienne comme Julia l’infirmière (excellente Louise Bourgoin), l’ enseignant (Micha Lescot) ainsi que la Présidente de la Cour d’Assises (Marina Foïs) et l’avocate Générale (Sophie Guillemin). Devoir juger quelqu’un qui n’a pas trouvé sa place dans la société alors qu’on est dans le même cas, voilà une des problématiques très intéressantes du film. C’est dommage, que Samuel Theis veuille en raconter trop, car l’histoire qui lie Fabio à Marie est tout aussi originale et captivante mais les deux sujets ont du mal à s’imbriquer. Puis s’ajoute un troisième sujet, plus politique lors des échanges au tribunal, la question étant comment établir la justesse d’une peine. Ici les propos sont plus convenus. Samuel Theis qui a obtenu la Caméra d’Or pour son premier film est un réalisateur avec une vraie vision et qui sait diriger des scènes collectives pleines de vie en mêlant des « gens ordinaires » (acteurs pour l’occasion) et des comédiens professionnels. C’est même là un des ses grands talents. Le casting est excellent et dégage une énergie très homogène. La photographie de Jonathan Ricquebourg est très belle. Même si le film aurait mérité plus de concision, il comporte des qualités entre autre de réalisme et de subtilité en évitant esbroufe, effet de manches et manichéisme.