Pour qui connaît son histoire du western, genre de divertissement qui régale aussi bien la critique que le public, les jeunes et les vieux, les hommes et les femmes...bref tout le monde quoi, l'année 1939 fut une date charnière. Auparavant les westerns étaient estampillés séries B, dorénavant ils vont prendre une importance beaucoup plus large dans l'industrie du cinéma. Henry King fut avec Ford un des premiers à réaliser des westerns beaucoup plus ambitieux, en démontre ce Jesse James dont nous allons parler. Tout d'abord la présence de stars, indispensable, nous met dans des condition d'interprétation de luxe. Heny Fonda et Tyrone Power composent des frères James inoubliables, un peu trop calibrés « icônes américains » mais dont le jeu de comédien relève d'une excellente qualité. D'ailleurs les seconds rôles ne sont pas en retraits : Randolph Scott d'une sobriété absolue, Nancy Kelly assez convaincante, Henry Hull vraiment énorme en Major Cobb (que l'on retrouvera bien plus exploité dans le Retour de Frank James). Ensuite par un scénario se livrant à des envolées spectaculaires soutenus par une trame passionnante qui dépasse de loin, en complexité, toutes les productions mineures alors caractéristiques du western. C'est ben simple : le film de King commence par une exposition de l'envers de la politique des compagnies de chemins de fers américains. La violence pointe déjà le bout de son nez, les tensions sont prêtes à éclater, et l'aventure se lance alors au travers de cet homme torturé qu'est Jesse James, en proie à une dualité bien retranscrite par Tyrone Power qu'on a dévalué. Le film ne déjoue pas tout les clichés, mais est empreint d'un puissant rejet du manichéisme, bien plus évident en tout cas que pour une grosse majorité de westerns que l'on verra après. C'est sans doute le plus gros apport personnel du réalisateur, avec la mise en scène d'une justesse admirable, peaufinée par une photographie délicieusement rayonnante de jeux de lumières, et il faut noter enfin l'absence de musique hors génériques. Les scènes d'actions sont montées avec dynamisme (citons le fabuleux morceaux de bravoure qu'est l'évasion des frères de Northfield), les dialogues bien écrits et la psychologie des personnages bien ébauchée, en attendant les futures périodes du sur-western où celle ci sera pleinement développée au travers de films n'hésitant pas à sacrifier l'action à son profit. La scène finale se veut d'une simplicité maximale, afin de renforcer son intensité, et c'est une belle mort qui est offerte à Jesse James quoiqu'on l'eut voulut plus bouleversante. Mais qu'importe, il y a des moments d'émotions nous empoignent davantage dans d'autres parties du film, notamment les deux poursuites où les frères James cavaleront ensemble. Un très beau western, divertissant tout en représentant des personnages légendaires, ne sombrant pas une seconde dans la redite, et proposant une histoire évitant tout chant d'un patriotisme américain trop souvent envahissant dans ces cas de figure.