Pour son premier film hollywoodien, la réalisateur hollandais Paul Verhoven frappe un très grand coup avec ce film coup de poing et visionnaire à bien des égards ! Pourtant, il faut bien admettre qu’un film mettant en scène un robot policier dans un Détroit futuriste n’était pas forcément promis à un grand avenir (surtout en 1987) et paraissait condamné à un statut de série B, voire Z. Et pourtant, il existe, parfois, des miracles avec des productions qui font une succession des bons choix. Et "Robocop" en est un bel exemple. Le héros-titre, tout d’abord, est une merveille de personnage iconique (réinventant le cowboy façon machine), dont on se dit, après coup, qu’il ne pouvait pas ne pas séduire le public. Son armure grise, son aspect massif, son casque qui ne laisse apparaitre que le bas d’un visage monolithique, sa démarche ou encore son énorme flingue sortant de sa cuisse sont autant de parti-pris payant qui ont suscité bien des vocations dans les cours de récré de l’époque. Car, et c’est sans doute le plus grand paradoxe du film, "Robocop" a cartonné auprès des gamins de l’époque (au point d’être décliné en jouets et en dessin animé !)… alors qu’il s’agit de tout sauf d’un film pour enfants. Il est vrai qu’avec le Hollandais Violent aux manettes, il ne fallait pas s’attendre à une bluette insipide. On a donc droit à une bonne dose de violence bien frontale, avec ses séquences particulièrement éprouvantes qui marquent à jamais l’esprit du spectateur (comment oublier la mise à mort de ce pauvre Murphy ou l’épouvantable sort réservé au méchant Emil qui a modérément apprécie son bain d’acide ?). Comme toujours, Verhoven ne se contente pas de filmer la violence gratuitement puisqu’elle sert parfaitement son propos, terriblement critique vis-à-vis de la société américaine. A l’instar de son futur "Starship Troopers" (avec lequel "Robocop" partage beaucoup de points communs), Verhoven truffe son film de séquences acerbes (ah les flash infos tellement improbables) et fustige le cynisme des puissants
(le n° 2 de l‘OCP qui fricote avec la racaille de Détroit, le créateur de Robocop qui espère la mort prochaine de Murphy pour finaliser son projet !)
ainsi que la violence de la société moderne. Eminemment politique (et terriblement critique donc), "Robocop" n’est pas, pour autant, austère puisqu’il assure le spectacle avec sa BO grandiose (signée Basil Poledouris), ses séquences d’action ultra-efficaces, et ses effets spéciaux dantesques (mention spéciale au maquillage de Murphy). Les effets spéciaux n’ont, d’ailleurs, étonnement pas vieilli
(à une ou deux exceptions près dont les mouvements de l’ED 209 et la chute finale du grand méchant)
, ce qui renforce la grande modernité du film, aujourd’hui encore. Enfin, Robocop peut s’appuyer sur un incroyable casting de gueules de cinéma, avec Kurtwood Smith, Ronny Cox, Miguel Ferrer, Ray Wise… et, bien sûr l’incroyable Peter Weller qui réussit à faire vivre son personnage, y compris après sa transformation. Seule Nancy Allen ne m’a pas transcendé, peu aidée, il est vrai, par une coupe de cheveux invraisemblable et un rôle peu écrit. "Robocop" est, donc un film incroyable qui vaut bien plus que les critiques incompréhensibles dont il a été victime, un temps, sur ses dérives prétendument fascisantes… et qui est, fort heureusement, devenu, depuis, une référence incontournable du cinéma des années 80 !