Priscilla, molle du désert. Après le récent carton du Elvis de Baz Lurhmann qui faisait porter le chapeau (la banane) au manager de la star (qui a rendu folle sa vedette), voici que Madame Priscilla Presley donne sa version de l'histoire, le manager en moins (elle n'a pas dû le croiser souvent, déjà que son mari était difficile à garder à la maison...). Priscilla est un film de Sofia Coppola (cause féministe + couleurs roses sépia partout) basé sur les mémoires écrites de l'ex-femme d'Elvis, productrice exécutive (comprenez : rien n'est moins objectif), et est un étrange objet culturel. Visuellement, Priscilla est soigné (la photo est top), les acteurs ne sont pas mauvais (Cailey Spaeny dont c'est le premier vrai rôle, est très à l'aise, et son compagnon Jacob Elordi - oui, le mec de Riverdale - nous fait heureusement oublier sa série en campant un Elvis très convaincant... et très grand, on y reviendra), on n'a pas l'impression de revoir deux fois le même film (le manager est totalement absent, donc si Elvis est un gars toxique, il en est le seul fautif), on valide des deux pouces le message féministe derrière ce parcours de femme mariée trop jeune et insouciante à un manipulateur égocentrique (il l'excite et la rejette tour à tour)... Et si le cœur vous en dit, vous pouvez passer le temps en écoutant cette BO digne d'un nanar de luxe, qui nous met toutes les chansons du King au ralenti, qui enchaîne des solos d'instruments improbables (la scène de la demande en mariage et dudit mariage qui se suivent en deux minutes sur un solo de xylophone puis de ukulélé... Des instruments qui jouent tout seul sans raison apparente - l'orchestre, c'était trop cher), qui tombe à chaque fois à côté de la plaque (on ne remarque que la musique). Car oui, vous allez avoir besoin de vous occuper avec la musique : le film est mou, linéaire, et cadré dans un espace temporel très réduit (mais étiré sur deux heures). On nous montre dès le début le côté amouraché de Madame qui, couplé à l'époque assez encline à faire taire les épouses mécontentes, ne laisse aucun doute sur le contenu de ce que l'on va suivre de sa vie avec le narcissique Elvis. On suit lentement, gentiment, poliment, chaque scène qui n'a rien d'original, annone la biographie-style de l'épouse déçue, sans scène d'éclat, et sans justifier jamais la durée des 2h affichées au compteur. C'est lent, ça manque d'entrain, ça n'impressionne jamais, bref on s'ennuie, sauf à trouver ponctuellement un plan très joli (le jeu de jambes du King de dos en pleine lumière - élu "plan qui ne sert qu'à attirer le chaland dans la bande-annonce, mais n'a en fait aucune fonction dans le film" -), à aimer les jeux de tailles entre Spaeny et Elordi (la caméra est volontairement très malaimable avec la petitesse de Madame Presley, et cela lui donne un côté fragile, accentué par l'actrice de 1m50 et l'acteur de 1m96), et à se dire que la BO tente de nous divertir en faisant n'importe quoi. On s'est enquiquiné poliment, mais on rêve maintenant d'une cérémonie des Oscars (où le film sera forcément... Récompense à la Mostra de Venise oblige) avec une ouverture sur un remix au xylophone et ukulélé (et au ralenti) des tubes du King. Faut assumer sa BO.