Claire Vassé a été critique de cinéma pendant onze ans à Positif, puis à Zurban. Elle a également produit et animé l’émission Le Cinéma l’après-midi sur France Culture. Autrice de romans (Bientôt la bête sera morte, Où va le chagrin quand il s’en va, entre autres), elle signe avec Double foyer son premier long-métrage.
Avec Double Foyer, Claire Vassé voulait mêler deux de ses obsessions qui parcourent ses romans : l’amour et l’espace. Si les modèles de vie imposés par la société sont souvent remis en cause, celui de ne pas vivre ensemble quand on est un couple avec enfant est rarement discuté.
La réalisatrice explique : “Qu’est-ce qui fait que l’on continue à s’accrocher à cette façon de vivre tout en se plaignant de la routine de nos vies, du désir qui s’émousse parce qu’il est englué dans les tâches ménagères ? La persistance de ce modèle, dans notre société qui a pourtant envoyé balader beaucoup de principes, me questionne beaucoup. Il faut croire qu’au-delà des questions matérielles d’organisation du quotidien, faire le choix de ne pas partager le même espace remet plus souterrainement en question nos façons de concevoir l’amour, l’intime, la liberté, l’absence de l’autre, la mort…”
La réalisatrice ne voulait pas livrer une étude sociologique sur le couple : “Ce qui m’importe avant tout quand je raconte une histoire, au-delà de son sujet, c’est sa résonance. Celle de Lili et Simon, je voulais qu’elle résonne avec simplicité et légèreté, qu’elle soit portée par l’énergie et la joie d’être amoureux dans un quotidien pas fatalement promis à l’ennui et aux mesquineries.”
Avec Double Foyer, elle ne prétend pas avoir trouvé LA solution pour les couples mais à montrer “qu’on a tous une marge de manœuvre pour inventer nos vies de couple et de famille. Bien sûr que beaucoup de choses nous sont imposées par la société, mais peut-être moins qu’on ne le pense. Il suffit parfois d’un petit pas de côté pour mettre un peu d’air et d’utopie dans nos vies.”
Lors de l’écriture, Claire Vassé a imaginé que le personnage de Simon vivait sur son lieu de travail puis a supprimé cette caractéristique pour faciliter les repérages : “Et la réalité a rejoint la fiction avec Sébastien Julien, ce garagiste plein de poésie qui habitait justement au-dessus de son garage, comme je l’avais imaginé dans un premier temps ! Et qui a eu la gentillesse de nous autoriser à y tourner. Avec ce garage, la réalité a fait plus que rejoindre la fiction, elle l’a nourrie. Ce garage est un vrai décor de cinéma, avec ces fenêtres intérieures du bureau qui surplombent le garage et font face à celle de la chambre d’Abel.”
Double Foyer marque la première apparition à l’écran d’Arthur Roose, qui joue Abel. Il s’agit du petit frère d’un camarade d’école de la fille de Claire Vassé : “Je lui ai immédiatement trouvé une grande cinégénie, une lumière, une joie de vivre. Et quand il est venu passer les essais, j’ai senti que j’aurais plaisir à travailler avec lui, à chercher avec lui le personnage d’Abel, dont il partageait naturellement la vivacité d’esprit. C’était important qu’on sente qu’Abel est un petit garçon certes plein de questionnements, mais heureux.”
La réalisatrice ne voulait pas situer son histoire à Paris afin de la rendre plus universelle : “à Toulouse, j’aimais le soleil, la lumière, les fameuses façades roses, la gentillesse et la simplicité des gens. Tout cela correspondait parfaitement à l’esprit que je recherchais. En outre, c’est une ville qui a été étonnamment peu filmée et j’ai beaucoup apprécié les comédiennes et comédiens que j’y ai rencontrés pour jouer les seconds rôles, tous de sacrés tempéraments : Corinne Mariotto, Régis Lux, Mikael Alhawi…"