En 2012, la co-réalisatrice du documentaire, Léa Clermont-Dion, a expérimenté sa première forme de harcèlement 2.0, notamment des menaces de mort et de viol : "Des attaques à mon physique et à ma sexualité, une délégitimisation intellectuelle : les attaques classiques et insidieuses faites aux femmes. Je me suis alors repliée et je me suis tue. J’avais 22 ans et j’ai eu honte d’être une femme pendant un certain temps. Lorsque j’ai pris conscience de l’ampleur du phénomène et du nombre de femmes touchées, j’ai eu envie de faire ce film, audacieux dans son approche et coup de poing dans son effet, pour faire changer les choses."
Le documentaire suit quatre femmes et un homme :
-Marion Séclin : cette comédienne, autrice et youtubeuse française a reçu 40 000 insultes, menaces de mort et menaces de viol après le partage d’une vidéo où elle dénonce le harcèlement de rue. Après s'être retirée des médias sociaux pendant deux années, elle crée sa chaîne Youtube pour reprendre la parole.
-Laura Boldrini : Présidente de la Chambre des députés de 2013 à 2018, elle est la femme la plus cyber-harcelée d’Italie. Depuis les premiers jours de son investiture, la femme politique reçoit des menaces de viol et de mort, par milliers. Elle prépare un projet de loi en Italie, qui imposerait des conséquences financières réelles aux médias sociaux qui laissent les messages haineux se propager sur leurs plateformes.
-Laurence Gratton : cette enseignante dans une école du Québec est harcelée par un ancien collègue de classe depuis 5 ans. Menaces de viol, menaces de mort, harcèlement, photographies de la jeune femme qui se sont retrouvées sur des sites pornographiques du « dark web »... La jeune québécoise n’est pas la seule : plus de 40 femmes ont été ciblées par le même individu.
-Kiah Morris : Représentante de l’État du Vermont, Kiah Morris a été élue pour la première fois en 2014. En tant que seule femme noire de la Chambre, elle a servi sa communauté pendant deux mandats consécutifs, mais elle a dû démissionner en 2018 après des mois de harcèlement en ligne. Elle est la cible d’un groupe d’hommes de droite qui lui ont envoyé des messages haineux et même des menaces de mort.
-Glen Canning : il est le père de Rehtaeh Parsons, qui s'est suicidée en 2013 à la suite des mois de harcèlement en ligne qui ont suivi la diffusion sur le web d’images de son viol. Conférencier dans les écoles secondaires, Glen Canning consacre désormais sa vie à l’éducation des jeunes hommes, quant à la question cruciale du consentement.
À l’étape de leurs recherches, les réalisatrices souhaitaient donner la parole aux agresseurs. Après avoir consulté des expert.e.s dans différentes sphères (réseaux sociaux, psychologie, droit, etc), elles ont réalisé que le but ultime des agresseurs est de faire taire les femmes, de les réduire au silence. "Nous avons choisi de donner la parole aux victimes parce que les agresseurs souhaitent justement les faire taire. Nous avons décidé de donner la parole aux femmes parce que c’est leur parole qui est menacée. Elles ne sont pas crues. On banalise ce qu’elles vivent. Dans le but de changer les perceptions sur la cyberviolence, nous avons décidé de suivre nos protagonistes au plus près du réel, dans leur quotidien, pour que l’on puisse prendre la pleine mesure des souffrances qu’elles subissent", expliquent-elles.
Avec ce documentaire, les réalisatrices tenaient à montrer que la cyberviolence est réelle et dangereuse : "Comment se vit cette violence soi-disant virtuelle? C’est ce que cet opus aux airs de thriller s’attache à montrer, en suivant les victimes au plus près, dans leur quotidien. On vit en temps réel les vagues de haine qui les assaillent, la peur qui envahit l’espace intime, la perte du sentiment de sécurité dans les lieux publics. Une vie marquée, où perte de confiance et honte se côtoient".
-73% des femmes utilisatrices d’internet à travers le monde ont déjà subi une forme de violence en ligne.
-À l’échelle mondiale, les femmes sont 27 fois plus susceptibles d’être harcelées en ligne.
-63% des Françaises de 18 à 24 ans ont déjà reçu une photo d’organes sexuels contre leur gré sur un site de rencontre en France en 2018.
-53% des jeunes femmes de 18 à 29 ans ont déjà reçu des images explicites qu’elles n’avaient pas demandées.
-Seulement 1 femme victime de cyberviolences sur 4 aurait signalé le comportement à la plateforme en ligne sur laquelle il s’est produit.
-Seulement 14% des femmes victimes de cyberviolences l’auraient signalé à une agence de protection hors ligne comme la police.
-54% des femmes qui ont été personnellement victimes de cyberviolence connaissaient l’agresseur.
-50% des femmes ont déclaré qu’Internet n’était pas un endroit sûr pour partager leurs idées.