Tourné juste après le premier épisode de « Mad Max », il est peu dire que« Tim » n’a pas eu le même destin que son illustre prédécesseur. Sorti en vidéo avec pour seul argument la présence de Mel Gibson au générique, cette production Australienne racontant l’histoire d’amour entre une femme mûre et un jeune attardé mental, n’est toutefois pas aussi mauvaise que l’on aurait pu le redouter. Unique réalisation de l’acteur Michael Pate (vu notamment chez Mankiewicz et Sturges), « Tim » souffre surtout de la comparaison avec « Breezy » de Clint Eastwood, où ce dernier abordait six six ans auparavant un sujet très proche. Mais alors qu’Eastwood réussissait à provoquer quasiment à chaque instant l’émotion, que ce soit par la délicatesse avec laquelle il traitait ses deux héros, ou encore l’évolution de leur relation, toujours crédible, Pate montre d'énormes difficultés à faire ressentir au spectateur de telles sensations. Pourtant, sa mise en scène, plate au possible, présente paradoxalement quelques avantages : l’oeuvre ne tombe jamais dans un pathos insupportable et mièvre, l’esbroufe visuelle étant ainsi évitée. De plus, alors que l’on pouvait craindre la caricature grossière des « petites gens », on se prend de sympathie pour les parents de Tim, brave couple qui, malgré un trait forcé, évite sans trop de soucis l’image habituelle de la famille odieuse et brutale.
Reste que nous ne sommes jamais surpris par le déroulement du film, que ce soit dans la tournure que va prendre la relation entre Mary et Tim, où encore les réactions de la soeur de ce dernier, comme s’il fallait pour chaque film traitant de la question du handicap un personnage intolérant, d’autant que celui-ci n’est ni efficace, ni vraiment cohérent. L’ensemble de l’oeuvre n’est d’ailleurs jamais vraiment crédible, la faute à un déroulement plutôt mollasson et à des dialogues banals, ne réussissant jamais à nous convaincre des pouvoirs de séduction que peut avoir Tim sur Mary, physique excepté bien sûr.
Heureusement, Mel Gibson s’avère à la hauteur dans un rôle pourtant très casse-gueule, restant toujours dans une retenue qui lui va à ravir. Pourtant, ce n’est pas lui le principal argument du film, qualitativement du moins : c’est bien Piper Laurie. Principalement connue pour sa splendide interprétation dans «L’Arnaqueur» et du grand public pour son rôle non moins mémorable de la mère de Carrie dans le film éponyme, celle-ci fait ici étalage de tout son talent : nuancée, subtile, douce : elle est un peu tout ce qui manque au film pour que celui-ci soit une vraie réussite, preuve qu’une toute autre carrière aurait pu, aurait dû être possible pour elle.
Ce très beau duo de cinéma aurait même pu être suffisant si l’ensemble ne souffrait pas d’un défaut majeur et irréparable : sa musique. Autant celle-ci peut parfois être un réel argument pour la réussite d’un film, autant elle est ici un véritable boulet dont l’oeuvre ne se relèvera d’ailleurs jamais vraiment. Ringarde, dégoulinante et rapidement énervante, évoquant une sorte de Michel Legrand de l’indigent, elle vient de plus souligner systématiquement les moments importants du film, lui ôtant toute possibilité d’émouvoir dans les scènes-clés, et même de manière générale. On oscille par conséquent entre deux sentiments : celui d’avoir vu une oeuvre sincère, où la caricature est joliment évitée, mais également celui d’une tentative beaucoup trop naïve (à l’image de la fin) et limitée pour la rendre convaincante. Dommage avant tout pour ses deux acteurs principaux, qui méritaient vraiment mieux que ce petit film pas antipathique donc, mais totalement anecdotique.