C’est un très bon film sur un sujet vraiment compliqué : le mystère de la relation entre Pierre Bonnard, un de nos plus grand peintre français, et sa muse. Qui était Marthe ? Et qu’aurait fait Pierre Bonnard s’il ne l’avait pas rencontrée ? Il était déjà un peintre reconnu avant elle, il fréquentait les salons bourgeois parisiens, le monde de l’art, il était ambitieux, il se ressourçait dans la famille de sa sœur (Terrasse) où il se sentait bien et il était déjà « le peintre du bonheur ». Marthe arriva. Ils voyagèrent en Europe en amoureux, toujours tous les deux, seuls, puis elle le tint reclus à la campagne pour la peindre, la baiser (pardon pour le mot, mais le film insiste pas mal sur le sujet), la soigner aussi (elle était jolie mais de santé fragile, voire dépressive), et progressivement elle le coupa de son monde d’avant. Il y eut sur le tard le drame avec Renée, poignant, et la solitude à deux qui reprit jusqu’à la fin. Pas facile de tirer un film de cette histoire, qui finalement n’en est une que parce que Bonnard peignait, peignait, peignait, tout le temps, toujours à la recherche de « qui est Marthe? », glissant sa silhouette, son visage inexpressif, absolument partout. Et cela devint une œuvre majeure. Pas de politique, pas de religiosité, pas de sociologie dans cette histoire. Les événements du siècle sont absents des préoccupations du couple. Ils ne croient pas, ni à dieux, ni à la patrie, ni au grand soir. Ils essayent juste de se connaître, et ils n’y arriveront jamais. Jamais Pierre Bonnard ne sût que sa femme avait une famille (pourtant présente dans le film), il mourut dans cette ignorance, et cela déboucha sur un des plus grand procès de l’histoire de l’art à l’occasion de sa succession, avec l’entrée en scène de Daniel Wildeinstein. Ce dernier, marchant d’art franco-americain, décupla sa fortune pourtant immense à cette occasion, et il permit d’etablir la jurisprudence actuelle sur la propriété morale de l’artiste sur son œuvre. Il y aurait là matière à un autre film, au passage.
Il faut connaître un minimum la véritable histoire de l’oeuvre de Pierre Bonnard pour apprécier ce film, qui réussit à faire ressentir l’époque, la psychologie des personnages, sans rien falsifier de la vraie histoire, et avec des images splendides, de la nature, de la peinture.
Seule la dispute de Marthe et de Mischa dans la rivière m’a gênée, caricaturale. C’est pas grave.
Les acteurs sont supers, surtout à mon avis Vincent Maccaigne en Pierre Bonnard. Cecile de France est très bonne aussi, même si je trouve qu’on lui fait jouer une Marthe un peu trop « déterminée » à mon avis. Elle y réussi mais était ce bien le caractère de la vraie Marthe ? Est ce que la vraie Marthe « portait la culotte » dans le couple ? On voit là qu’il s’agit d’un film de 2023 avec le réalisateur qui cède peut être à l’humeur de l’époque.