Il Boemo est un biopic sur un compositeur, et bien sûr on pensera à Amadeus ou à Ludwig von B. dans ce registre très particulier consistant à rendre cinématographique la musique ! Malgré ses qualités, ce film n’y arrive pas pleinement. Il faut reconnaître de beaux décors, une reconstitution soignée, une photographie raffinée. Le film a de l’élégance, et ce, même si on sent le manque de budget, par exemple dans la rareté des plans d’ensembles. Cela finit par se voir un peu, on finit par moment par se sentir légèrement à l’étroit dans le cadre, mais bon, on est pas dans une super production américaine non plus. En revanche, la mise en scène du réalisateur est assez figée, froide, très monolithique avec des plans fixes, je n’ai personnellement pas trouvé ça pleinement en adéquation avec la musique baroque, là où Forman faisait, à juste titre je crois, le choix inverse d’une réalisation ébouriffante.
Au-delà de sa forme, Il Boemo est bien interprété, et plus que Vojtech Dyk, tout en sobriété de jeu, ce sont surtout les seconds rôles qui m’ont le plus convaincu. Ciccariello surprend agréablement en roi dilettante mais pas que, et les actrices sont brillantes. Le trio Vladi-Radonicich-Ronchi apporte tout son sel au film, les actrices ayant chacune des personnalités très typées et incarnant finalement les personnages les plus intéressants par le balayage qu’elles opèrent sur le type féminin de cette époque. La finesse du jeu des trois actrices rend toutes leurs scènes intéressantes et elles phagocytent carrément le personnage principal ! C’est à la fois une qualité et un défaut quand même !
Scénaristiquement, le film est riche, authentique, c’est un biopic mais qui n’en fait pas trop dans le didactisme et l’exposition. Malgré tout, Il Boemo ne semble pas avoir eu une vie si mouvementé ou surprenante que ça, et le film aura tendance à se répéter, et s’il se charge de tous les personnages féminins que j’évoque ci-dessus, c’est notamment pour s’épaissir, car au fond, l’histoire d’Il Boemo reste assez linéaire, sans grande montagne russe, il a du succès, et même sa fin est ambigue. Certes il traverse quelques épreuves, mais au fond, il reste sous le feu des projecteurs. L’histoire vaut donc surtout pour la manière dont elle dévoile les mœurs de l’époque, le monde du spectacle, l’atmosphère des alcoves et des salons, le libertinage, la condition féminine, c’est tout un siècle qui se révèle au spectateur, et finalement c’est peut-être là le but du film.
En clair, un métrage soigné, plaisant, enrichissant, et c’est déjà bien ! On est à mon sens dans un film un peu trop glacé, figé, avec un personnage principal qui n’a pas une épaisseur folle, ce qui rend l’ensemble un peu plat pour un film sur la musique baroque, laquelle, j’en conviens, est très présente et très agréable à écouter du reste. Là-dessus Il Boemo vous ravira, car on profite de tout, parfois pendant de longues minutes, ce qui amène presque le film dans le registre de la comédie musicale. 3.5