Comme son père et son grand-père avant lui, le jeune Rakib voue une indéfectible loyauté au général Purna. Homme à tout faire, gardien, cuisinier, chauffeur, il assiste le vieil homme, revenu habiter sa maison de famille pour briguer les suffrages de ses concitoyens qui le craignent et le vénèrent.
"Le Pion du général" est un film indonésien, le quatrième pays le plus peuplé au monde, le plus grand pays musulman par sa population, mais dont la production cinématographique n’est pas au diapason de sa taille. L’Indonésie, on le sait (ou pas !) a connu pendant la Guerre froide trente années de pouvoir autoritaire sinon de dictature, pour se démocratiser tardivement à la fin des années 90. Elle porte encore les stigmates de ces temps troublés comme l’ont montré les deux documentaires époustouflants de Joshua Oppenheimer sur les massacres de 1966 : "The Act of Killing" et "The Look of Silence".
Makbul Mubarak, dont la famille servit sous le régime de Suharto, interroge la figure de l’autorité et les limites de la loyauté. Le titre original du film, "Autobiography", souligne cette inspiration personnelle. La traduction française n’en est pas moins habile, qui fait référence au goût du héros pour les échecs.
Pour le jeune Rabik, le général Purna est tour à tour un mentor, un père de substitution et un ogre dont il doit à tout prix, sauf à y perdre son âme, échapper à l’emprise carnassière. Mais, comme d’ailleurs un autre film diffusé en France l’an passé, "Une femme indonésienne", "Le Pion du général" souffre d’une mise en scène trop taiseuse et empesée, qui étire le scénario sur près de deux heures sans qu’on comprenne le retournement de son héros, qui passe de la soumission la plus totale à l’insubordination.