Dernier Hong Sangsoo en date, avant le prochain déjà présenté à Berlin, Walk Up marque encore une radicalisation dans son style. Elle était ténue dans les films précédents, mais là, il n'y a plus une seule once d'intrigue, le montage a disparu, chaque séquence est un plan séquence fixe (les mouvements de caméra doivent se compter sur les doigts d'une main) et on n'a plus les zooms caractéristiques sur le visage durant les longues conversations.
En voyant Walk Up on a l'impression qu'il a épuré son cinéma au maximum, comme si avant où c'était quand même déjà assez sobre, c'était encore trop. Tout le film se passe dans un seul lieu : un immeuble avec sa terrasse, son restaurant, son appartement, et le personnage principal, joué une nouvelle fois par Kwon Hae-hyo, va simplement passer d'une pièce à l'autre au fur et à mesure du film. D'ailleurs la seule musique extradiégétique du film survient lorsqu'il y a une ellipse. Hong Sangsoo toujours dans cette volonté d'épure ne s’embarrasse pas à mettre un carton indiquant combien de temps a passé, non, il met la musique et on comprend.
Et une nouvelle fois le personnage principal est un réalisateur de film et il va être amené à rencontrer différentes femmes dans cet immeuble. La plus marquante étant sans nul doute la propriétaire, la première que l'on voit, et qui apparaîtra dans chaque segment de manière de plus en plus intrusive. Elle est une figure planant sur tout le film, limite comme une menace (elle demande le loyer, elle ouvre le courrier) et surtout il semble y avoir une sorte de désir inavoué en elle, mais jamais le perso de Kwon Hae-hyo ne semble réellement daigner la regarder. Pire, il va même regarder toutes les autres, sauf elle.
Chaque partie du film, qui représente à chaque fois une temporalité distincte, semble surtout mettre en scène une étape dans une relation, la rencontre, le début de la fin, etc, ce qui fait que sans intrigue le film arrive malgré tout à toucher le spectateur, puisqu'il parle de situation connues, éprouvées. Et c'est sans parler que forcément on ne peut pas s'empêcher, encore une fois, de penser que Hong Sangsoo parle avant tout de lui, de son rapport au public, à la maladie, au cinéma, peut-être même à l'alcool (d'ailleurs le vin remplace le Soju pendant une bonne partie du film, jamais le cinéma n'a connu telle trahison).
Comme quoi on n'est pas obligé de s'empêtrer d'intrigues, de révélations pour raconter des choses simples et universelles (mais on le savait déjà). Walk Up en est l'illustration. Un beau film, très mélancolique dans sa manière de toujours laisser un peu d'amertume dans les relations, de ne jamais les faire aboutir pleinement, où comme dans la vie il y a toujours un petit hic, un petit truc qui cloche. Réussir à retranscrire ça au cinéma, c'est fort.