Comme beaucoup d’auteurs prolifiques et reconnus, François Ozon a une filmographie avec des hauts et des bas. Et il semblerait qu’après le doublé magistral du drame d’investigation sur la pédophilie au sein de l’Église, « Grâce à Dieu », et sa sublime chronique adolescente eighties, « Été 85 », le cinéaste soit dans un creux. En effet, après le décevant drame sur l’euthanasie « Tout s’est bien passé » et l’exercice de style en hommage à Fassbender « Peter van Kant », il continue sur une pente descendante avec « Mon crime ». Alors mettons les choses au clair : pas que le film soit mauvais, bien au contraire, mais il semblerait qu’il y ait un peu de paresse de sa part à adapter cette pièce de théâtre pour livrer un film populaire avec un casting de stars qui sent la recherche de succès en salles au bon souvenir de « Potiche » et surtout de son chef-d’œuvre « 8 femmes ».
Il connait bien la chanson (même s’il ne s’agit pas d’une comédie musicale ici) et officie en terrain connu. Avec « Mon crime » on a le droit à tout ce que l’on peut espérer d’un matériau de base issu du théâtre. Ni plus, ni moins. C’est d’ailleurs très bavard, immobile et verbeux. La reconstitution de la France des années 30 est au poil et opulente même si on la retrouve davantage dans les intérieurs que dans les extérieurs, par la force des choses. Ce sont donc surtout les décors des appartements, les costumes et les accessoires qui prévalent à ce niveau que les rares plans larges sur un Paris rêvé et moribond. L’histoire se suit avec plaisir, l’intrigue enchaînant les rebondissements et les estocades à un rythme soutenu. On ne peut le nier, Ozon n’a pas son pareil pour rendre flamboyantes à l’écran des moments de scénario a priori fades. Et il s’inscrit, de manière un peu opportuniste mais qu’on sait sincère, dans un mouvement féministe très à la mode actuellement.
Avec ce duo de jeunes comédiennes impeccables incarnant des personnages hauts en couleur, qui font d’ailleurs terriblement penser au duo criminel formé par Catherine Zeta-Jones et Renée Zellweger dans l’immense « Chicago » mais en mode frenchie ado, on passe un bon moment. Néanmoins, c’est l’accumulation de saynètes, il est vrai majoritairement mémorables et visiblement portées par des comédiens contents d’être là, qui nous charment plutôt qu’un véritable film majeur digne de ce nom dans son entièreté. Et à ce petit jeu, Isabelle Huppert, Dany Boon et Fabrice Luchini, tous trois en roue libre contrôlée qui se tirent la part belle du gâteau mais aussi les meilleurs moments de « Mon crime ». Un film qui laisse aller également à une réflexion sur le pouvoir des médias et la corruption. Bref, c’est délicieusement suranné, gentiment démodé, plutôt facile mais définitivement agréable et croustillant. Cependant, ce long-métrage restera une œuvre mineure dans la carrière d’Ozon, en dépit de son succès probable, et qui sera aussi vite oubliée qu’on s’en sera délectée.
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