Grossier mais jamais vulgaire
C’est à la britannique Thea Sharrock que l’on doit cette pépite so british. Je l’avais découverte en 2016 avec sa très belle romance Avant toi. Ces nouvelles 100 minutes sont un plaisir de chaque instant, ou quand le gros mot est élevé au rang de l’art. Littlehampton, 1920. Lorsque Edith Swan commence à recevoir des lettres anonymes truffées d'injures, Rose Gooding, sa voisine irlandaise à l’esprit libre et au langage fleuri, est rapidement accusée des crimes. Toute la petite ville, concernée par cette affaire, s’en mêle. L'officière de police Gladys Moss, rapidement suivie par les femmes de la ville, mène alors sa propre enquête : elles soupçonnent que quelque chose cloche et que Rose pourrait ne pas être la véritable coupable, victime des mœurs abusives de son époque... Un affrontement pour le moins fleuri entre les femmes d’un même village qui semble frappé par le syndrome de la Tourette … pour notre plus grande joie.
Le film s'inspire de l'histoire vraie de voisines ennemies et des lettres ordurières qui agitèrent l’Angleterre des années 1920. Le scénario est à la fois original et drôle mais pas sans fondement. Et c’est cet ancrage réel e cette authenticité, qui permettent de se passionner pour le film. D’ailleurs, le personnage de Gladys Moss a réellement existé. Elle fut la première inspectrice de police de l’histoire du Sussex. Outre les personnages, un soin particulier a été apporté aux décors, - tournage effectué dans de véritables petits villages du Sussex -, les accessoires et les costumes. Le film est nerveux, pétillant d’un humour unique et les dialogues truffés d’injures et d’insanités jusqu’à la dernière image du générique final. Inutile de vous dire que la VO s’impose plus que jamais. Et puis il y a un casting +++ qui porte cette comédie trash incontournable.
Et l’immense Olivia Colman de nous dévoiler toute la facette comique de son talent. Face à elle, l’incroyable Jessie Buckley qui jure comme un marin ivre et son abattage insensé. La délicieuse Anjana Vasan, Joana Scanlan et le couple de parents, Gemma Jones et Timothy Spall, Tout ce beau monde s’amuse visiblement beaucoup à déverser ces tombereaux d’injures dans ce fantastique traîté de grossièretés à peine imaginables. De l’humour à la pelle, un féminisme intelligent et revendiqué, pour un film qui touche juste en nous parlant à la fois d’une société engoncée dans ses certitudes, son racisme larvé, sa misogynie assumée et les délires autoritaires des hommes… l’Angleterre de années 20 ? Vraiment ?