Je suis absolument atterré par certains commentaires écrits sur ce fil. Et les nouveaux censeurs qui s’y expriment m’inquiètent beaucoup. Il faudrait donc limiter l’âge d’accès à des œuvres pour la simple raison qu’on n’a "pas compris" ? ou parce qu’ils jouent avec nos peurs ? Mais alors, quid des contes pour les petits ? de La Belle et la Bête (Cocteau) ? des Contrebandiers de Moonfleet ? du Voyage de Chihiro ? de La Prisonnière du désert, des films de Tim Burton ? j’en passe et des meilleurs. Il faudrait donc interdire des films parce que ceux-ci ont le tort d’être plus exigeants que la moyenne ?
Aussi je me permets de déposer ici quelques conseils élémentaires pour éviter les mauvaises surprises. Car on ne va pas au cinéma comme on goûte un nouvel aliment ou on essaye un nouveau jeu, se contentant alors d’un bien puéril "J’aime/ J’aime pas". Le visionnage d’un film ça se prépare, et notre rôle d’adulte est de se renseigner en amont pour savoir à quoi s’attendre et permettre aux enfants d’y avoir accès. Quelques conseils donc :
- La veille de la projection, on lit le synopsis, on regarde la bande-annonce. Ça permet aux enfants d’avoir quelques repères, et visuels et narratifs, de lever d’emblée les potentielles difficultés du récit.
- Au moment de la projection, si on est avec plusieurs enfants, on s’installe à côté du plus petit. Ca permet de répondre à ses questions (s’il en a) et de dissiper d’éventuels malentendus. Exemple avec ce film : mon fils de 7 ans - à côté duquel j’étais assis donc - ne savait pas si l’un des personnages était un gentil ou un méchant. Je lui ai donc répondu très rapidement, sans que cela ne gêne personne dans la salle, et lui de retourner au film, visiblement rassuré.
- Enfin et surtout, on discute du film APRES l'avoir vu.
C’est peut-être sur ce dernier point qu’on distinguera les films les plus intéressants. J’ai eu une discussion passionnante avec mes enfants après la projection. Si le plus jeune est passé à côté du message (sans que cela nuise à son plaisir), ma fille de 9 ans a été déçue de ne pas tout comprendre. Nous en avons donc longuement discuté car Le Secret des Perlims est un secret bien gardé… qui s’apprécie d’autant plus qu’il faut y réfléchir un peu ! Et qu’on ne me dise pas qu’il n’y a rien à comprendre. Tout est parfaitement clair à condition de faire un petit effort. Est-ce que cela a permis à ma fille de l’apprécier davantage après coup ? J’aime à le croire mais ce que je vois surtout, c’est que ces longues discussions prolongent le plaisir et l’émotion du visionnage, permettent au film de laisser une empreinte plus durable dans l’esprit.
Pour en revenir au film, puisque c’est de lui qu'il devrait s’agir avant tout, il faut savoir qu’il est dans la même veine thématique que le précédent film de Alê Abreu, l’excellent Le Garçon et le Monde (2013) dont on ne dira jamais assez qu’il s’agit d’un grand, d’un très grand film d’animation. La narration y était plus complexe encore et riche de sens. On retrouve ici l’ambition d’un récit porteur et exigeant, même si je dirais que celui-ci s’égare un peu, parfois, dans des détails peu importants par rapport à l’intrigue. Cela dit, la foi en l’avenir et la jeunesse du cinéaste brésilien portent le film au-delà de toute réserve, de même que son univers graphique éblouissant, véritable arc-en-ciel alors que le déluge menace partout autour.
Pour finir sur ce billet bien trop long, je recommande donc :
1) De prendre ce que vous lirez ici avec des pincettes (y compris ma propre contribution),
2) De faire confiance aux programmateurs de salles quand ils suggèrent des limites d’âge (à partir de 6 ans pour le film dont il est question ici),
3) D’aller voir Le secret des Perlims pour se faire sa propre opinion.
Après avoir lu les commentaires postés ici j’ai demandé, agacé, à mes enfants s’ils avaient eu peur. Leur réponse : "Pas du tout". CQFD.