On a fondu comme une glace au soleil... Oui, Aftersun est lent, très contemplatif, et l'on ne jettera pas la pierre (le galet de plage) à ceux qui ont sombré dans l'ennui, tandis que de notre côté on plongeait tête la première dans une belle mélancolie, dans une joie mêlée de tristesse, dans un binôme tout à fait charmant du papa "dans la Lune, mais fou d'amour pour sa fille" (adorable Paul Mescal) et sa petite fille (tout aussi adorable Frankie Corio) qui est tiraillée entre son amour réciproque pour son papounet et son envie d'autonomie... Sauf que, là où on commençait à trouver longues les séances bronzettes et les étalages de crème solaire, Aftersun a dégainé un échantillon de son après-soleil triste, très triste : un flash-forward où quelque chose semble ne pas aller, où l'on perçoit un souvenir à enterrer, et l'on fait alors rapidement le lien avec
le papa qui sombre peu à peu dans la déprime anticipative, qui sait qu'à la fin de l'été, il devra dire adieu à sa fille pour qu'elle aille avec sa mère dans un autre pays.
Et Aftersun nous a d'un coup renversé comme un pâté de sable : d'abord on ne savait pas où le film voulait en venir, et d'un coup on a vu toute la mélancolie des moments de bonheur, savourés par le papa comme "des derniers", se forçant à profiter du présent, vivant tout au passé. Il nous a brisé le cœur, et le premier twist (
sa tentative de suicide par noyade
) nous a fait une petite frayeur, sachant pertinemment que l'on aurait quand même droit à cette finalité plus tard dans le film, et Aftersun de nous laisser littéralement sur une porte ouverte, pour notre part une image esthétisée du
papa qui quitte la scène avec tous ses souvenirs de vacances.
Tout comme ce papa, à partir du moment où l'on a compris qu'on aurait droit à une fin tragique, on a essayé de ralentir le temps, de grapiller le bonheur dans les scènes de complicité, Aftersun nous a fait ressentir le présent que l'on vit déjà au passé, avec une fin qui nous a fait sortir les lunettes de soleil pour cacher nos yeux embrumés.