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    EO
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    Cinememories
    Cinememories

    481 abonnés 1 465 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 1 juin 2022
    L’un des fer-de-lance polonais a gagné en visibilité sur la croisette cette année. Outre Roman Polanski et Andrzej Wajda, Jerzy Skolimowski est un cinéaste qui n’hésite pas à suralimenter l’expérience de visionnage, afin de fluidifier sa narration, quitte à perdre une partie de son public. Il nous revient avec un objet purement sensoriel dans une sélection cannoise qui a déjà goûté à la palme. Pourtant, l’ambition de ce dernier n’est pas aussi luxuriante, elle se révèle même modeste, au prix de mille détours émotionnels. En misant sur le point de vue innocent d’un animal mélancolique, il brosse le portrait contemporain d’une nation à la fois sauvage, vivante et sans concession. Le visage du monde peut également se lire dans un coin, où certaines tendances sociales ne sont que les conséquences des mesures éthiques et capitalistes.

    Godard est dans chaque plan de cette odyssée, à l’image du roi d’Ithaque qui recherche éternellement son foyer. Eo est ainsi catapulté du cirque où il a été élevé avec un certain amour, celui d’accompagner Kassandra (Sandra Drzymalska) dans chacune de ses chutes, face à un public qui se satisfait de leur cœur saignant et encore tout chaud. Les gros plans se multiplient sur le désespoir de l’animal, dont on ne saura jamais s’il éprouve un besoin de renouer avec une nouvelle âme solitaire ou bien avec cet inconnu, qu’il sonde et qui le libère du joug de l’Homme. Eo est fatalement pris entre deux feux, entre la bienveillance et la brutalité d’un environnement qu’il ne peut que fuir, afin d’envisager un avenir, pourtant incertain. C’est toute cette tragédie qui anime le parcours de ce dernier, à travers les champs, les villages et les routes, où chaque escale est ponctuée par un jeu de regard entre l’animal et sa proie.

    Le fantôme de Robert Bresson règne dans tout le récit, sachant que le cinéaste polonais lui doit son élan. Comme « Au Hasard Balthazar », son héros croise la route de l’humanité, souvent comprimé dans ses propres déboires, ses propres intérêts, alors que lui reste là, à attendre qu’on le soutienne ou qu’on le libère de ce monde froid et repoussant. Ce ne sera pas aussi dépressif qu’on le pense, car d’autres instants empoignent l’amour pour Eo comme un acte de réconciliation et un acte de rébellion, face à la violence. Nul ne peut célébrer sans se blesser de nos jours et c’est un constat navrant que l’on lit dans les yeux de la bête, mais pas seulement. Skolimowski cherche à dépasser le noir et blanc de son aîné, par la force de la composition et du mouvement, comme si la vie de l’âne gris en dépendait. Travellings et codes de l’horreur, parfois fantastiques, sont les bienvenus dans les transitions ou les ruptures de ton soudaines.

    Ce sont dans ces moments précis, qu’« Eo » (Hi-Han) explore toutes les nuances entre le rêve et la cauchemar. La bande-originale sera également là pour nous rappeler cet inconnu qui s’empare de chacun de ses pas et de l’écran, un son qui agît comme une piqûre, là où on ne l’attend pas et qui est plaisant de recevoir. L’ignorance est la valeur la mieux entretenue par l’Homme, tout comme ses diverses formes de violences. Le verbe est donc économisé et l’image parle d’elle-même. C’est ce sur quoi le film prend son envol et c’est ce sur quoi l’âne et sa protectrice se séparent, au prix de larmes que le spectateur est en droit de partager.
    Audrey L
    Audrey L

    631 abonnés 2 580 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 31 mai 2022
    Amis des bêtes, attention : on est ressorti de la séance la boule au ventre, le moral dans les chaussettes et les yeux boursoufflés, étant très sensible au thème de la cruauté envers les animaux, on a été plus que copieusement servi. Eo vous raconte ainsi l'histoire d'un âne de cirque qui parvient à s'évader...mais avant de crier intérieurement "Yes !" à la lecture de ce synopsis (comme on l'a fait en pensant voir un film mignon), sachez simplement qu'il ne s'en échappe que pour mieux se faire torturer, de toutes les façons que vous pouvez imaginer (et même celles que vous n'aurez jamais pensé voir...). Voici donc que le gentil petit âne spoiler: tire une charrette lourde en plein soleil et en se faisant aboyer dessus par un molosse, porte des gamins bruyants dans un circuit éternellement identique, puis passe par une forêt où se déroule une battue sanglante, puis tombe dans une ferme à fourrure (à ce stade, on a commencé à sentir nos tripes faire des demi-tours), puis dans une ferme de reproduction forcée, dans des transports et abattoirs écœurants de cruauté.
    On savait pertinemment comment l'histoire allait finir, et pourtant, on n'a pas pu se lever de notre siège, préférant moucher et souffrir en silence comme l'ensemble de la salle, une communion de papiers froissés et de jurons soupirés pour dire combien il y en a marre de ces pratiques légales qui n'ont rien d'humain, d'éthique, de normal, en soit. Après Okja, Eo nous en a remis une couche en y ajoutant toutes les maltraitances animales existantes, et on déplore que la liste soit toujours si longue. Le film pâtit néanmoins de sa mise en scène clinquante qui cherche outrancièrement la récompense en ce Festival de Cannes, ce qui est vraiment dommage car on perd parfois de vue le propos ("Pourquoi il y a un skieur qui traverse ?!", "Allez l'éolienne sur filtre rouge, tu vas voir qu'on va tourner simultanément, comme dans une lessiveuse... Et voilà.", "On peut avoir le nom du fou qui a fait la musique,"...). On se pique aussi à penser qu'il y a toujours un brin d'hypocrisie à ce genre de films qui dénoncent la maltraitance animale...en faisant tourner un animal (surtout vu les situations stressantes reproduites dans le film, même pour de faux... Le logo "bien-être animal" à la fin nous a fait rire jaune). Néanmoins, pour le bien de la majorité animale, Eo est un visionnage plus que nécessaire, une douleur poignante du spectateur (un véritable marquage au fer rouge, impossible de l'oublier) qui permettra un jour, on veut y croire, d'avoir un vrai respect et une bienveillance sincère à l'égard des animaux. Pauvre bête, vraiment : pauvre bête.
    Arthur Brondy
    Arthur Brondy

    227 abonnés 973 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 25 mai 2022
    L’histoire tragique d’un âne - EO - prononcé « Hi Han » qui malgré sa relation privilégiée avec Kasandra, dresseuse dans un cirque va être saisi et placé dans un haras avec des chevaux. Mais ce dernier va subir déconvenue sur déconvenue, et va être déplacé encore et encore. Au fil des rencontres, le film s’attelle à montrer comment l’homme s’accapare les animaux, leurs sentiments et leurs vies, les utilisant à tort et à travers se moquant littéralement du bien être de l’animal. Un film engagé et puissant filmé à merveille. Petit bémol malgré tout, au milieu de ce petit chef d’œuvre, le réalisateur décide d’y glisser quelques séquences rouges qui n’apporte absolument rien au récit…
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