Revoir Naples et… mourir
Malgré ses 63 ans, peu de films de l’italien Mario Martone sont arrivés jusqu’à nos écrans. Ces 117 minutes nous font le regretter, car, ce drame est remarquable en tous points. Après 40 ans d'absence, Felice retourne dans sa ville natale : Naples. Il redécouvre les lieux, les codes de la ville et un passé qui le ronge. Ce film est adapté du livre éponyme d’Ermanno Rea. Ce portrait d’un Naples loin des clichés et du tourisme de masse est passionnant. Le personnage principal nous entraîne sur ses pas à travers cette ville pas comme les autres et son errance finit par nous hypnotiser jusqu’aux scènes finales qui scellent le destin qui semblait inéluctable. Une fascinante immersion.
Martone nous explique : Être Napolitain, c’est une façon particulière d’être Italien. Notre ville est restée la même depuis la Grèce antique. Naples est une ville dans laquelle il y a une sorte d’abandon, un désenchantement, qui peut subitement se retourner, se renverser, pour devenir un enchantement. A Naples, chanter, jouer, être comédien, c’est naturel. Chacun se dissimule derrière un masque, et cache ainsi la conviction profonde que le fait d’être au monde est une condition de souffrance. Bref, un décor idéal pour une tragédie digne de l’antique. Tout est beau dans ce film, les décors – sublimes -, les cadrages et évidemment l’interprétation.
Pierfrancesco Favino est un formidable acteur. Son talent avait éclaté dans Le Traître en 2019. Il confirme – et comment – dans ce film sombre. Sa rencontre avec Tommaso Ragno reste le sommet de ce drame. Citons encore les excellentes participations de Francesco di Leva, Sofia Essaïdi, Aurora Quattrocchi, parmi une distribution truffée de seconds et petits rôles très bien tenus. Ce n’est pas un film de maffia, mais un drame sur des fantômes du passé qui ressurgissent dans la vie d’un homme rongé par le remords et la culpabilité, dans sa quête de rédemption. Envoûtant, sans faille et implacable, un des beaux films du moment.