Avec Fratè, Karole Rocher a voulu adresser une lettre d’amour à la Corse : Vezzani, le lieu de l'intrigue du film se situant en Haute Corse, est le village de ses grands-parents. La réalisatrice y a passé presque tous ses étés depuis qu'elle née, tout comme ses filles, son frère Patrick Rocher et, depuis leur rencontre, son compagnon Thomas Ngijol :
"C’est l’endroit que nous aimons le plus au monde. Nous y retrouvons nos origines ; des valeurs et des principes forts auxquels nous sommes profondément attachés et que, très naturellement, Thomas a aussitôt partagés. Son lien avec l’identité corse et son amour pour Vezzani est tel qu’il a éprouvé l’envie d’en faire un scénario...", confie la cinéaste.
Barbara Biancardini, avec qui Karole Rocher co-signe la réalisation de Fratè, n'est autre que sa fille. Début 2020, lorsque le projet a commencé à se monter, la réalisatrice a d’abord envisagé de réaliser le film seule. La crise sanitaire est alors arrivée et le tournage a dû être reporté :
"Il n’était absolument pas question de laisser le film dans les tiroirs mais je ne m’imaginais pas repartir en solo. Barbara, avec qui Thomas et moi avions déjà souvent travaillé, avait fait du chemin et était devenue première assistante", se rappelle Karole Rocher, en poursuivant :
"Je connaissais son talent, sa proximité avec les comédiens, son rapport à la réalisation et son attachement à Vezzani. Elle avait partagé avec nous toutes les étapes de la préparation : c’était l’occasion pour nous de former un duo et pour elle de démarrer comme coréalisatrice."
Avec Fratè, Karole Rocher et Thomas Ngijol collaborent pour la quatrième fois au cinéma après Fastlife, Black Snake, la légende du serpent noir et Madame Claude.
Si le compagnon de Karole Rocher, Thomas Ngijol, interprète Dumè, c'est Samir Guesmi qui a été choisi pour incarner Lucien. La cinéaste explique : "Il s’agissait vraiment de nous prouver qu’il était possible de faire ce métier par amour, et de le faire de tout notre cœur avec des gens que nous aimions, qu’il s’agisse des acteurs ou des techniciens."
"Les acteurs secondaires sont des comédiens corses que nous connaissions, tous les autres sont des gens du village. Ils se sont non seulement prêtés gracieusement à toutes les scènes de figuration mais nous ont aussi ouvert les portes de leur bar, de leur maison. Ils nous ont fait confiance. Le village entier est devenu un studio de cinéma."
Pour la phase de montage, Karole Rocher, Barbara Biancardini et le chef monteur Christophe Pinel disposaient d'une montagne de rushes : "C’était au contraire un luxe d’autant que les prises n’étaient pas non plus éparpillées. C’étaient plutôt des nuances de jeux, de dialogues. Le temps pressant et ne nous permettant pas d’intellectualiser, il nous a fallu y aller à l’instinct et c’était bien", confie Barbara Biancardini.
Biancardini est le nom de famille du grand-père de Karole Rocher. Un patronyme que sa fille Barbara a choisi pour sa carrière de réalisatrice. Certaines scènes du film, au cimetière, sont tournées devant le caveau des grands et arrière-grands-parents des réalisatrices.
"Jusqu’à ce tournage, en dehors de Thomas, je n’avais jamais amené personne à Vezzani. Et je ne suis pas sûre que j’aurais assumé l’aventure il y a trois ans, quand le film aurait dû se faire. On était chez mes grands-parents, ils n’étaient plus là, j’étais comme un vrai chien de garde."
"Barbara m’a beaucoup aidée à surmonter leur disparition. Je ne sais pas quelle sera la carrière du film mais je sais qu’il est d’abord le film de Vezzani et de ses habitants et que, dans plusieurs générations, il comptera pour ceux qui nous y succèderont", précise Karole Rocher.