Très beau film, exceptionnellement intelligent. Une analyse toute en finesse d'une personnalité solitaire, à la limite entre rationalité et imaginaire.
Elle est rationnelle, cette Lydia (excellente Hafsia Herzi!), sage-femme qui exerce son métier avec bien plus que de la conscience professionnelle: de l'empathie, de la tendresse, de la passion.... Sauf que, en dehors de ce métier qui la fait vivre, littéralement, elle n'a rien. Ses parents sont morts, elle n'a pas de famille. Elle n'a que Salomé (Nina Meurisse), son amie de toujours, celle avec qui depuis le collège, elle a tout partagé. Salomé est mariée maintenant, avec Jonathan, (Younès Boucif) mais leur relation est restée fusionnelle.
La vie sentimentale de Lydia, elle, a l'air désastreuse. Son petit ami la plaque juste le jour où Salomé découvre joyeusement sa grossesse... Alors, quand elle n'est pas de garde, elle traîne, sans joie, sans but, la nuit, n'importe où
Les media nous racontent régulièrement l'épopée d'une femme un peu dérangée, en mal d'enfant, qui kidnappe un nouveau-né dans sa poussette. En général, il ne lui est fait aucun mal, et le bébé est vite retrouvé. Le cas de Lydia, à la personnalité qui restera toujours un peu opaque, est infiniment plus complexe, comme le suggère ce merveilleux titre: Le Ravissement, avec son double sens, celui d'émerveillement, et celui qui va avec ravisseuse...
Salomé est en pleine dépression post-partum. Elle ne fait que pleurer, se désole de ne pas arriver à aimer cet enfant pourtant désiré (il semble que c'est plus fréquent qu'on ne le pense), elle est donc trop contente de confier la petite Edmée (c'est Lydia qui a proposé le prénom aux parents...) à son amie qui va s'en occuper, la promener... Mais, on voit bien que la prise de possession de la jeune femme a déjà précédé la naissance. L'accouchement ne se passe pas très bien, il est très long, le bébé commence à souffrir, il serait raisonnable de recourir à une aide médicale, mais Lydia s'obstine: ELLE, pour ELLE, aurait refusé les forceps....
A partir de là, comment Lydia va s'inventer une vie de mère, comment elle va y associer, bien contre son gré, Milos, un chauffeur de bus serbe (Alexis Manenti) qui va petit à petit se prendre au jeu -ne sachant pas, évidemment, que c'en est un, et comment ça va se terminer, eh bien vous le saurez en suivant cette histoire sans temps mort, un peu exceptionnelle mais qui sonne tellement vrai! C'est sûr, Iris Kaltenbäch dont c'est le premier long métrage est une grande. A ne rater sous aucun prétexte!