Au Pérou, l'écrivain Alfredo Bryce Echenique (83 ans) est considéré comme un trésor national et son premier roman, Un monde pour Julius (1970), possède un statut de chef d’œuvre qui a largement dépassé les frontières de son pays. Adapter un tel pavé de 600 pages en à peine une heure trente représentait une gageure et la réalisatrice Rossana Diaz Costa, née l'année de la parution du livre, a volontairement choisi de s'intéresser avant tout à Julius, garçon né dans un cocon élitiste mais en grande partie délaissé par sa frivole de mère et élevé par des domestiques aussi fidèles que méprisés par ses employeurs, de par leur extraction, plus que modeste. C'est donc la confrontation de deux classes à part et très éloignées l'une de l'autre qui conditionne l'enfance de Julius et sa prise de conscience, plus sensible qu'intellectuelle, vu son jeune âge (9 ans pour la plus grande partie). La grande maison, presque un palais, qui sert de cadre au récit, en est le cœur vivant, précisément délimité entre ses différents territoires. Le film est assez satisfaisant dans sa reconstitution mais déçoit tout de même par sa réalisation classique, presque académique, du monde des nantis (avec une interprétation un peu figée) face à celui des pauvres, montré de façon tendre et chaleureuse, ce qui, il est vrai, correspond à la volonté de filmer cette histoire à hauteur et à sensations d'enfant. A travers Un monde pour Julius et notamment son plan final, l'idée est aussi de démontrer, sans ambigüités, que rien, ou presque, n'a changé au Pérou, depuis les années 50, en termes de clivages sociaux.