C'est peu dire que le cher "Starman" [1984] de notre ami carthaginois (né en 1948 dans cette petite ville de l'Etat de New-York) John CARPENTER a fichtrement BIEN "vieilli" ! Sans doute s'est-il même bonifié avec le temps... Le personnage de la jeune veuve joué par l'excellente Karen Allen (à la voix brisée, émouvante et murmurante comme l'océan tout au long de ce long métrage inspiré produit par les studios Columbia) est inoubliable...tout comme les mimiques comiques de quasi-pantin puis la gravité croissante du personnage de l'extraterrestre (incarné par le très subtilement théâtral Jeff Bridges), condamné à ne survivre que trois jours en ce milieu hostile qu'est au moins pour lui notre petite surface convexe terrestre : les deux principaux ingrédients inoubliables et complémentaires de cette comédie romantique qu'on ne se lassera jamais de revoir... L'écran large, le sens du cadre, le sens du temps, le "climat" d'une scène, la nudité d'un paysage : Carpenter va toujours à l'essentiel... Une courte scène telle celle de "nos" deux néo-tourtereaux assis muets face à une indienne tout aussi mutique, enveloppée dans une couverture, voyageant tels des "hobos" à l'arrière d'un Truck qui les a pris en stop (ils fuient les Autorités qui pourchassent l'E.T. perçu comme une "menace"), tandis que défilent à l'arrière plan la "Monument Valley" dont les cimes hivernales sont saupoudrées de neige est une sorte de "scène de contrebande", un moment de pure magie cinématographique quasi-muette (car le bébé que cache l'Indienne sous la couverture va se mettre à vagir...). Voyons maintenant les informations collectées dans l'article "John Carpenter" de l'encyclopédie en ligne WIKIPEDIA : " Jeff Bridges y interprète le rôle d’un extra-terrestre qui s’échoue sur Terre et qui prend l’apparence du mari défunt d’une jeune veuve, jouée par Karen Allen. [...] Produit par Michael Douglas, "Starman" est une œuvre singulière dans la filmographie de John Carpenter, un film qui s’apparente davantage à un road movie romantique plutôt qu’à un vrai film de science-fiction, en contraste total avec ses précédents longs-métrages. En conflit avec Hollywood depuis l’échec de "The Thing", le cinéaste déclare avoir tourné ce film en guise d’excuse aux studios : « "Starman" était une sorte de mea culpa, c’était comme si je disais : vous voyez que je suis aussi capable de faire un joli film romantique. » Carpenter le considère d’ailleurs comme son film le plus hollywoodien, une sorte d'« E.T. l'extra-terrestre adulte ». Il sort en salles en 1984. Le succès est davantage critique que commercial, le film étant nommé pour de multiples récompenses, incluant l’Oscar et le Golden Globe du meilleur acteur pour Jeff Bridges, et le Golden Globe de la meilleure musique pour Jack Nitzsche.". Oui, bien sûr, "Starman", cet "Homme-Etoile", est l'antithèse de la très repoussante et protéiforme "chose" de "The Thing" (1982, cet autre sommet artistique de l'Oeuvre carpenterienne, s'il en est !) mais aussi de la niaiserie de l'E.T." de Steven SPIELBERG... un film adulte et inspiré. Le personnage un peu improbable (sorte de chasseur de "Flying Saucers" à haute caution gouvernementale) incarné par l'excellent Charles Martin Smith ajoute une touche d'humour et de recul très "bédéesque" à la réussite de l'ensemble... Nous repensons à ce qu'écrivait Bertrand Tavernier à propos de la filmographie de John Carpenter, qualifié de "faiseur" et soupçonné de roublardise : pareil aveuglement a de quoi laisser pantois... L'amateurisme (à tous les niveaux) de 95 % de la production cinématographique française contemporaine s'avère, lui, flagrant ! Si les qualités intrinsèques de l'Oeuvre de J.C. a été peu à peu reconnue (grâce à cette "seconde vie" offerte à ses 18 longs métrages sous forme de supports VHS, DVD et Blu-Ray), les jugements blasés qu'on surprend encore aujourd'hui à propos de l'originalité et de l'exigence d'oeuvres contemporaines comme "The VVitch" [2015] et de "The Lighthouse" [2019] de Robert EGGERS ou face au classicisme et au professionnalisme inspirés que respire un film comme "Green Book" (20018] de Peter FARRELLY nous font mesurer combien les préjugés et les jugements de valeur si faiblement argumentés de certains ont la vie dure... Ne voyez-vous donc pas que ces oeuvres DURERONT, elles aussi... telles celles de ce soi-disant "faiseur" de John CARPENTER, bon sang ?? Qu'elles seront tout simplement nos "Cat People" et nos "I Walked with a Zombie" (Jacques TOURNEUR, 1942, 1943) de demain ??? Bref, vive le cinéma "modeste", assumé "de genre" ("série B", comme on disait) et pourtant si exigeant, certes parfois fauché ("Dark Star", Assault on Preccint 13") mais pas toujours : celui de John CARPENTER ! Avec les raisons objectives de sa si grande pérennité : ses qualités esthétiques, ses scénarii toujours magnifiques et travaillé, son amour du travail bien fait... bref, son immense professionnalisme ! :-)