Le film a, ai-je lu, coûté 60 millions de dollars. Tout ça pour ça. D'abord, le titre "Civil War. Passons tout de suite : aucune contextualisation, on ne sait rien de ce qui divise les opposants. OK, on croit volontiers qu’il s’agit de trumpistes contre l'autre moitié de l'Amérique. Il ne s'agit même pas d'un film sur les reporters de guerre. Ceux-là sont des Pieds-Nickelés. Aucun.e n'est crédible, pas même l’experte, Kirsten Dunst. La légèreté de la jeunette, son inconséquence (qu'on ne peut même pas confondre avec de l'audace ou de la témérité tant elle est ridicule, quasi-gaguesque) nous feraient rire s'il ne s'agissait de combattants, de morts en sursis et réels. Certains y voient une ironie, une satire des excès médiatiques. C'est surtout une insulte aux vrais reporters de guerre qui eux, sont vraiment transis de peur, prennent mille précautions (déjà, rien que dans le souci de leurs tenues vestimentaire, comme on peut le voir dans les retransmissions TV ; là, ce sont presque des reporters de salon). Ah oui, ça pétérade, ça défouraille, ça canarde et ça fait du bruit. On nous dit que c'est la préfiguration de ce qui se déroulerait en cas de vraie guerre civile. On n'en doute pas quand on a déjà vu l'assaut du Capitole et les guérillas urbaines à Tripoli, Bagdad et bien d’autres. Là, tout est spectacle, spectacle extrémisé, exhibition, testostéroné ; on a l'impression de voir "Blade Runner". Certains y voient "Full Metal Jacket". Pitié pour le maître Kubrick, la force de FMJ était bien autre, avec un fond politique d'acier, totalement inexistant dans "Civil War". Quelle trame cinématographique ! Devant la Maison blanche, les soldats, voyant les Pieds-Nickelés entrer disent : "On va les suivre". Tintin en cinévision ! Et quels dialogues ! Dans la Maison blanche, quand le commando rejoint les Pieds Nickelés, nos héros leur demandent : "Vous êtes des Forces de l'Ouest ?". Réponse plate de la soldate : "Qu'est-ce que vous croyez". Ah, les gros plans photos en noir et blanc des gueules grimées, tendues, harassées des soldats pour conquérir l'émotion et l'adhésion du spectateur, le film en donne à la pelle, comme pour se dédouaner de son indigence. On rigole de voir la soldate à la tête du commando qui vient descendre le Président, sans doute pour montrer que les femmes sont aussi couillues, ou tout aussi factieuses, que les hommes. Au final, si on résume les scènes censées nous ouvrir les yeux sur ce que sera la future guerre civile, il y en a combien ? Une poignée, bien crapoteuses, certes (les pendus, la fosse commune), entrecoupées d’un road trip presque plaisant sur les routes bordées d'arbres. "American sniper", "Démineurs" et d'autres expriment autrement ce qu'est une guérilla urbaine, la tension qui saisit à chaque instant tous les protagonistes. On n'a pas besoin des images de "Civil War" pour deviner ce que sera la guerre civile moderne, tout le monde imagine que ce sera cruel et impitoyable. Les exactions des milices, comme les Scorpions ou les commandos de Mladic dans l'ex-Yougoslavie et moult autres, en donnent une idée terrifiante, sans même faire déferler mitrailleuses, avions de chasse et chars. Le côté finalement grand guignol des scènes de combat, l'absence totale de fond politique font de ce film un navet putassier. J'ai entendu la productrice de l'émission Cinéma de France Inter dire : "Mais c'est bien filmé". Son comparse lui a répondu : "Mais ça ne suffit pas". Bien parlé.