L’art de devenir grand-père
C’est un constat, Guillaume Nicloux ne fait jamais de films pour ne rien dire. Après une série de réalisations dans le genre thriller ou polar, depuis 2013 et La religieuse, il se consacre à des films plus profonds comme Valley of love, Les Confins du monde, il revient avec ce drame pur autour d’un problème sociétal qui va vite devenir crucial. Joseph apprend que son fils et le compagnon de celui-ci viennent de périr dans un accident. Ils attendaient un enfant via une mère porteuse en Belgique. Que va devenir leur futur bébé ? Joseph en est-il le grand-père légitime ? Porté par la promesse de cette naissance qui va prolonger l’existence de son fils, le sexagénaire part à la rencontre de la jeune flamande au caractère farouche et indomptable… 93 minutes qui auraient pu ne s’avérer que dramatiques mais qui, de par son traitement solaire, atteint parfois des moments de grâce inattendus. Un film émouvant et populaire au bon sens du terme.
En adaptant le roman Le Berceau de Fanny Chesnel, Nicoux retrouve certains deux de ses thèmes favoris, la disparition d’un être cher et le processus conduisant à la résilience. Mais, pour une fois dans sa filmographie, le récit est linéaire et compréhensible par tous donnant ainsi l’opportunité d’aborder le mélodrame sans autre souci que l’empathie et l’émotion, sans fantastique ni questionnements métaphysiques. Le film aborde donc le thème de la GPA, interdite en France, mais qui, en Belgique, est éthiquement acceptée mais sans cadre juridique. Ce film est aussi le portrait d’un homme vidé de tout, brisé par le deuil, et qui, peu à peu va retrouver goût à la vie par une sorte de parcours initiatique des ténèbres vers la lumière. Un feel good movie qui sait émouvoir en évitant les clichés.
Bon ! Disons-le tout net, il est de bon ton pour une certaine intelligentsia, de tomber à bras raccourcis sur tout ce que fait Fabrice Luchini sur les écrans. Ici, il porte avec son aisance habituelle sans doute un de ses meilleurs rôles – avec L’hermine en 2015 -. Décidément, il n’a pas fini de nous surprendre. Face à lui, la jeune Mara Taquin, qui pour son 1er grand rôle s’en sort à merveille. Ajoutons à ce duo de choc, Maud Wyler, Juliette Metten et Veerle Baetens. Un film sensible – et sans sensiblerie -, un film grave – et sans pathos -, un film drôle – sans jamais tourner ses personnages en ridicule -, cette « petite » vaut qu’on s’y attache.