Pour la réalisation de son premier long métrage, Anais Tellenne, la fille de Karl Zéro et de Daisy d'Errata (née Anne-Laure Chaptel), avait imaginé une histoire qui aurait dû donner naissance à un film fournissant beaucoup d'émotion aux spectateurs, une histoire puisant ses sources dans le mythe du Golem et dans "La belle et la bête". Cette histoire, c'est celle de la relation inégale et inégalement ressentie qui se crée entre Raphaël, le gardien d'un manoir, un joueur de cornemuse, un homme taiseux, physiquement disgracieux, et Garance, sa patronne, star de l'art contemporain version art-performance. Aurait dû ... Le problème, c'est que la réalisation n'a pas réussi à se placer dans le sillage de cette idée de départ, avec un certain nombre de choix plutôt malheureux. Un exemple : la scène qui voit Raphaël découvrir les dessins que Garance a fait de lui aurait due être remplie de tension et d'émotion. Eh bien, c'est loin d'être le cas du fait de l'ajout aux images d'une musique tonitruante qui annihile toute tension, toute émotion. Un peu plus loin, et on s'en félicite, une autre scène, cette fois ci entre Thierry et Garance, prouve que, comme c'est bien souvent le cas, l'absence de musique arrive bien mieux à communiquer de l'émotion que des flonflons fussent ils magnifiques. Au bout du compte, du fait de ces choix malheureux, il m'a fallu arriver au dernier quart d'heure du film pour ressentir, enfin, de l'émotion. Dans la distribution, Emmanuelle Devos et Raphaël Thiéry font le job et il n'y a rien de spécial à dire. Personnellement, j'ai surtout remarqué l'excellent jeu de Marie-Christine Orry, qui interprète Samia, une postière avide de rapports sadomasos qu'elle satisfait avec Raphaël. Quant au format du film, il est assez inhabituel : ce n'est du 1.33, ni du 1.37, ni du 1.66, c'est du 1.5, un format plutôt réservé à la photographie.
Si cela vous intéresse, voici quelques anecdotes : la réalisatrice a laissé son véritable prénom à Raphaël Thiéry et a donné à Garance le nom de famille de sa propre mère, Chaptel. Le film a été tourné dans le Morvan, dans le château du Jeu, aux pieds du Mont Beuvray. Raphaël Thiéry, originaire de cette région, est un vrai joueur de cornemuse et on a donné au groupe dans lequel on le voit jouer dans le film le nom de Terra Gallica, qui est le titre du 2ème album de Faubourg de Boignard, le groupe qu'il a fondé à la fin des années 80. Quant au groupe DMR, groupe qui précède Terra Gallica lors du concert auquel on assiste dans le film, il existe depuis quelques années et Quentin Millet, son joueur de cornemuse, est un proche de Raphaël Thiéry.