Raphael Girardot et Vincent Gaullier ont eu l'idée de faire ce documentaire durant l’été 2016. Plus de 4000 migrants se trouvent alors dans les rues de Paris, sans ressources. L’Etat, qui a en charge l’accueil de ces réfugiés, ne bouge pas et laisse s’installer des zones de précarité inacceptables nécessitant finalement une intervention humanitaire. Ils confient :
"Porte de la Chapelle, un centre de premier accueil est mis en place par la Mairie de Paris afin d’accueillir les hommes (un autre ouvre à Ivry pour les familles et les femmes seules). L’État est alors mis face à son incurie et contraint quelques semaines plus tard de reprendre en charge ce lieu. Révoltés par la raideur de notre société, effrayés par cette position occidentale toujours si prompte à se protéger, émus par nos rencontres avec des réfugiés dans les camps sauvages de Paris ou chez nous quand nous les avons hébergés, nous cherchions à partager notre regard sur eux."
Migrations dans le monde :
Personnes contraintes à la migration : 940 millions
Personnes arrivant dans un pays développé : 70 millions (Source : ONU 2020)
Demandeurs d’asile par million d’habitants en Europe en 2020 :
Chypre (1er au classement) : 8446
France (8e au classement) : 1215
Moyenne de l’UE : 913, contre 1414 en 2019, 2500 en 2016 (Source : Eurostat 2020)
Raphael Girardot et Vincent Gaullier se sont installés dans le camp pendant 18 mois et ont rencontré de nombreux réfugiés. Il se rappellent :
"Avec tous ceux qui nous donnaient leur accord d’être filmés, nous sommes restés collés pendant la dizaine de jours qu’ils passaient là, transpercés par leurs regards plein d’espoir. Nous avons filmé leur premier entretien où les traces de la rue sont encore visibles, puis les retrouvailles heureuses avec leurs compatriotes, le passage obligé au Samu Social pour partager leurs problèmes physiques ou psychiques, jusqu’à leur chambre où enfin ils pouvaient se reposer et se raconter."
"Après ces quelques jours de répit, nous les avons aussi filmé à la préfecture, là où se déroule la prise d’empreintes et où les réfugiés apprennent le sort qui leur est réservé. L’ambiance y est terriblement différente. C’est froid, glacé même, que ce soit dans le décor ou dans les propos. Youssef, Zerbo, Obahullai, Alhassan, Djibrill, Guyot, Salomon, Johnson, Pavel... tous ont vécu là le scandale de ce non-accueil français, cherchant prétexte à ne pas instruire une demande d’asile."
Quand ils se rencontrent en 2000 sur l’émission scientifique Archimède d’Arte, Vincent Gaullier est rédacteur en chef tandis que Raphaël Girardot a déjà réalisé deux documentaires. En 2002, sur un tournage en Bretagne, ils rencontrent un éleveur, Alain Crézé. Raphaël filmait déjà, Vincent se forme au son, et leur premier jour de tournage sera un baptême : l’éleveur doit laisser partir à l’abattoir son troupeau. Le lait sur le feu était né, avec déjà Iskra à la production.
L’envie est toujours commune dès le départ, le temps de repérage et de documentation long, l’écriture se partage aussi et enfin, sur le tournage, l’équipe est toujours réduite aux deux co- réalisateurs. Depuis, ils ont réalisé La Ruée vers l’Est, (festival Résistance 2011), Avec le sang des hommes (prix du meilleur documentaire, festival Luchon 2016), Atomes Sweet Home (Parisciences 2015) et Saigneurs (Cinéma du réel 2016 - sélection nationale).