Coup de gueule d’un cinéphile
Tout le monde a vu, un jour, cette vague quelque part sans savoir pour autant qu’elle est signée d’un peintre japonais du XVIIIème siècle, devenu célèbre sous le nom de Hokusaï. Le réalisateur Hajime Hashimoto, - dont c’est le 1er film projeté en Occident, tente dans ce biopic de 90 minutes de nous plonger dans une période très troublée de l’histoire de l’Empire du Soleil Levant. Japon, XVIIIème siècle. Alors que le pouvoir impérial impose sa censure sur les artistes, le jeune Shunrô, apprenti peintre, est exclu de son école à cause de son tempérament impétueux et du style peu conventionnel de ses estampes. Personne n’imagine alors qu’il deviendra Hokusai, célèbre auteur de la Grande vague de Kanagawa. Ma déception est d’autant plus grande que j’attendais beaucoup de ce moment de pure beauté.
Il semblerait que les distributeurs – en l’occurrence Art House – ont encore frappé, - cf. mon article de ce mardi -. Initialement, ce film durait 129 minutes. Pourquoi l’avoir réduit à cette petite heure et demie ? Evidemment pour des raisons de rentabilité. En réduisant sa durée de 40 minutes, on gagne une projection par jour dans les cinémas permanents ! Et pour ce faire on a visiblement revisité le montage n’importe comment et surtout en dépit du bon sens. Je comprends mieux maintenant pour quoi je me suis perdu dans ce récit haché par un incroyable nombre d’ellipses qui le rendent à la limite du compréhensible. Censurer un film qui dénonce la censure relève tout simplement du scandale. Quel dommage, car la beauté est là, dans les décors, les costumes, les accessoires, la musique et le jeu des acteurs. On aurait dû se réjouir de découvrir – et surtout de comprendre – l’évolution d’un artiste hors du commun, entre sa jeunesse fougueuse et sa vieillesse. Je regrette vraiment ne pas avoir été submergé par la Grande vague de Kanagawa. Grosse frustation.
Les acteurs japonais jouent… japonais, avec cette outrance parfois irritante pour nous. C’est sûr, on est loin de l’Actor’s studio. Les Yûya Yagira, Min Tanaka, Hiroshi Abe, ont beau faire, ils ne parviennent pas à nous intéresser pleinement aux péripéties souvent trop confuses d’un des plus grands artistes de l’estampe. La reconstitution est belle, le scénario gâché par les coupes pour le moins intempestives qu’un distributeur ignare a crû bon de pratiquer pour des motivations purement vénales. Quel gâchis !