À Montvilliers, une commune de la banlieue parisienne, les tensions sociales s’exacerbent après le décès du maire, son remplacement par un néophyte et la mise en oeuvre imminente d’un projet de réhabilitation urbaine qui passe par l’évacuation d’une barre d’immeubles.
Quatre ans après l’immense succès des "Misérables" (deux millions d’entrées, prix du jury à Cannes et quatre Césars dont celui du meilleur film soufflé à "J’accuse"), c’est peu dire qu’on attendait avec impatience le deuxième film de Ladj Ly. Il se présente comme le deuxième volet d’un triptyque consacré à la banlieue.
Depuis sa sortie, j’ai lu beaucoup de critiques, souvent défavorables, à son sujet. La principale est la comparaison à son désavantage avec "Les Misérables". Je ne suis pas le dernier moi aussi à comparer le film dont je fais la critique à d’autres, aux films précédents du même réalisateur ou bien à d’autres films d’autres réalisateurs sur le même sujet ou dans le même genre. Pour autant, je suis toujours un peu mal à l’aise à en faire un critère d’appréciations d’un film ; car il postule une comparaison que le spectateur, qui n’a pas nécessairement vu ces précédents, n’est pas toujours en mesure d’évaluer. Pour le dire autrement : si vous avez vu "Les Misérables", peut-être trouverez-vous "Bâtiment 5" moins bien ; mais si vous ne l’avez pas vu, "Bâtiment 5" n’est pas mal du tout.
Autre critique adressé à "Bâtiment 5" dans la presse : son manichéisme.
Certes, le cinéma de Ladj Ly est militant. Avec une rigueur documentaire, il stigmatise les impasses de la politique de la ville menée depuis quarante ans. Il affiche son parti pris, du côté des pauvres, des mal-logés et contre ceux qui en profitent et ne font rien.
Est-il pour autant manichéen ? Je ne le crois pas. Je trouve au contraire que les quatre personnages principaux du film sont bien campés et ne versent pas dans la caricature. Le nouveau maire (Alexis Manenti), un pédiatre de profession, voudrait bien faire. L’autre adjoint (Steve Tientcheu), qui revendiquait à bon droit cette magistrature, n’est pas un traître à sa race, mais au contraire un immigré de la deuxième ou troisième génération qui connaît bien le quotidien de ses administrés. La jeune Haby (Anta Diaw) est la figure par laquelle s’incarne la colère des populations menacées d’expulsion mais, elle ne verse pas dans le communautarisme et se revendique Française d’aujourd’hui. Blaz (Aristote Luyindula) est un jeune homme placide et doux qui, à force d’humiliations, basculera, lui hélas, dans la violence.
La fin du film manque de basculer dans l’excès et le grotesque. Elle est sauvée in extremis par le tout dernier plan et par le beau geste de Haby qui tourne le dos à la violence anarchique pour lui préférer le débat démocratique et la lutte politique.