Quand ses producteurs lui annoncent qu’ils cessent de financer son dernier film, Marc Becker s’enfuit dans les Cévennes chez sa tante Denise (Françoise Lebrun, égérie de Jean Eustache) avec sa monteuse (Blanche Gardin) et son assistante (Frankie Wallach, égérie de EDF) pour en boucler le montage. Mais cette fuite à la campagne exacerbe la créativité débordante du réalisateur, au grand dam de ses proches.
Michel Gondry, le réalisateur le plus perché, le plus branque, le plus imaginatif qui soit, est de retour, huit ans après son dernier film "Microbe et Gasoil", quinze ans après "Soyez sympas, rembobinez", qui est le plus représentatif de son cinéma de la bricole, dix-neuf ans après "The Eternal Sunshine of a Spotless Mind", qui lui valut une gloire immédiate.
"Le Livre des solutions" est une autobiographie grinçante, un hommage à sa tante, mais surtout l’autoportrait de l’artiste en doux dingue. Michel Gondry, à soixante ans passés, n’est plus un jeune homme ; mais il a trouvé son alter ego chez Pierre Niney, jeune trentenaire vibrionnant qui n’a jamais été aussi à l’aise que dans ce cinéma là, où toute sa fougue, toute son inventivité, tout son charme fiévreux peuvent s’exprimer sans entraves.
"Le Livre des solutions" multiplie les trouvailles. les scènes cocasses ou tendres s’y succèdent sans temps mort. On ne s’y ennuie pas. On y rit parfois, on y sourit souvent, au camiontage ou à l’assistant catarrheux jusqu’au tout dernier plan qui met en abyme le réalisateur et son film. On se laisse attendrir dès que Françoise Lebrun, avec sa voix d’une douceur inimitable berce son remuant neveu. Seul point faible : l’absence de scénario à proprement parler, le montage du film de Marc constituant le prétexte plus que la raison d’être à cette succession de vignettes.
"Le Livre des solutions" a le défaut de ses qualités. Il est trop gentil. Et la gentillesse, c’est comme la crème chantilly : à petite dose, c’est délicieux, à grosse dose, ça devient vite écœurant.