Romain pur jus, Sergio Corbucci n’a pas dû détester pouvoir fantasmer sa propre histoire de la cité antique quand il a démarré en1961 le tournage de « Romulus et Rémus » avec le privilège de pouvoir diriger les deux stars incontestées du péplum qu’étaient à l’époque Steve Reeves et Gordon Scott. Personnage truculent au talent protéiforme, reconnu comme un grand styliste par les uns, accusé de dilettantisme par les autres , Sergio Corbucci diplômé en sciences économiques a commencé comme journaliste avant de rejoindre le monde du cinéma en qualité d’assistant d’Aldo Vergano et d’Enzo Trapani. Il devient scénariste et ne tarde pas à se lancer dans la réalisation avec « Salvate mi figlia » en 1951, un drame s'inscrivant dans la veine néo-réaliste. Rapidement, il décide de mettre son talent au service des exigences de la production italienne de cette époque qui se veut avant tout opportuniste. Il approchera tous les genres avec plus ou moins de bonheur (sept comédies avec Toto), se révélant pleinement dans le western spaghetti qui lui permettra avec Sergio Leone et Sergio Sollima de constituer le fameux trio des trois Sergio. « Romulus et Rémus », son seizième film est une co-production franco-italienne assez ambitieuse qui prend pour toile de fond la création de Rome axée sur la légende des deux frères recueillis nouveau-nés par une louve qui les allaita, leur permettant d’accomplir leur prestigieux et funeste destin. Sergio Corbucci planche au scénario en compagnie de Sergio Leone et de Duccio Tessari à partir des écrits librement adaptés de Tite-Live. Si la musculature des deux vedettes est un atout du film, celle-ci n’est pas exagérément mise en avant, Corbucci souhaitant axer sa mise en scène sur l’affrontement entre les deux hommes. Il est donc demandé aux deux culturistes de délivrer plus de dialogues qu’à l’accoutumée. L’entreprise est plutôt réussie, Corbucci donnant le rôle le plus complexe à Gordon Scott qui indéniablement montre plus de dispositions que Steve Reeves dans l'exercice. Solidement accompagné par la très belle Virna Lisi et quelques solides seconds rôles, le duo parvient à donner le change. La photographie d’Enzo Barboni, futur réalisateur attiré du duo formé par Terence Hill et Bud Spencer, soutient parfaitement le propos qui favorise l’immersion plutôt que le recours aux effets spéciaux. Un très bon cru qui confirme la formidable ductilité du talent de Sergio Corbucci.