«Un couple, c'est parfois une sorte de chaos.»
Daniel, 11 ans, découvre le corps de son père aux pieds du chalet dans lequel il vit avec ses parents depuis un an. S'agit-il d'un accident, d'un suicide ou d'un homicide ?
Très vite, Sandra, la mère, est soupçonnée puis inculpée.
Découvert samedi dernier dans le cadre de l’événement "Cannes à Paris", ce 4e long-métrage de la réalisatrice Justine Triet (La Bataille de Solférino, Victoria, Sibyl), auréolé ce même soir par une Palme d'Or (la troisième remise à une femme depuis sa création au sein du Festival de Cannes) s'avère sans conteste être son œuvre la plus prenante, la mieux écrite également.
Car derrière ce très bon scénario, écrit par Triet et son mari Arthur Harari (Diamant Noir, Onoda), et le portrait de cette femme que tout semble accuser, c'est d'abord à une autopsie du couple et de la vérité que se prête le film.
Car, que ce soit dans les mots de Sandra ou de ceux qu'ils restent de son mari, où se situe la vérité ? Que ce soit dans les éléments présentés et les témoins auditionnés par la défense ou par la partie civile, où se situe la vérité ?
À l'intérieur de ce film de procès levant petit-à-petit le voile sur l'intime, la "vérité" est une question d'interprétation et n'a finalement que peu de place à l'intérieur de cette arène où les joutes verbales qui y ont lieu sont là pour influencer et convaincre l'auditoire présent (et nous par la même occasion) que la seule vérité qui compte est celle d'un camp ou de l'autre. Ou comme le dit l'un des personnages du film : «brouiller les pistes pour que la fiction finisse par détruire le réel.»
Ce qu'il s'est réellement passé, on ne le saura jamais vraiment, en tous cas de la bouche des protagonistes.
Mais ce film n'est pas là pour ça, il n'est pas là pour juger Sandra pour ce qu'elle a fait ou non.
Ce film, c'est d'abord une étude de mœurs, décortiquant la vie de couple (et par extension la vie de famille) dans ses moindres recoins, à l'image d'un puzzle que l'on tente de reconstituer mais dont il nous manquerait certaines pièces, et cherchant à comprendre comment on en est arrivé à cette situation-là. Et à l'intérieur de tout ça, la vérité, quelque part.
À nous, spectateur/spectatrice, de nous poser la question de là où nous nous situerions dans cette histoire, dans ce procès, dans ce drame.
Le genre de film, extrêmement bien dialogué et interprété (mentions spéciales à Sandra Hüller, Milo Machado Graner, Swann Arlaud ou encore Antoine Reinartz), qui vous fait réfléchir et vous reste encore bien en tête après son visionnage.
La sortie de cette Palme d'Or bien méritée est prévue le 23 AOÛT prochain dans nos salles, et bien sûr je ne peux que vous la recommander.