On peut qualifier, et ce sans trop se compromettre, The Deer Hunter (Voyage au bout de l'enfer) comme étant une référence majeure du Septième art à propos de la Guerre du Viêt-Nam, ce que peuvent en attester sa formidable réputation et ses nombreuses récompenses (avec en vrac 5 Oscars, comportant celui du Meilleur Film) ; dans une même veine, ce second film de Michael Cimino eut pour effet d'ouvrir de plus en plus le cinéma US à un sujet pour le moins sensible dans le contexte d'époque (70s), ce qui souligne la portée significative de The Deer Hunter sur l'industrie ciné' et le public en général. Mais trêve de parlottes, quid de son contenu même ? Le bal est ouvert au gré d'un long acte introductif (plus d'une heure), celui-ci permettant la mise en place de personnages aussi ordinaires (milieu ouvrier) que plaisants ; ceci autorise par la même occasion le long-métrage à observer la Guerre du Viêt-Nam sous un angle presque inédit en la matière. On peut toutefois formuler un reproche concernant le rythme alors adopté, se traduisant par des séquences traînant quelque peu en longueur (mariage si tu m'entends), tandis que l'on note une scène saugrenue entre toute qui apparaît comme peu utile au premier abord (le béret vert, au mariage qui plus est). M'enfin, l'ensemble s'avère fort concluant et même captivant ("One shot" nous trotte en tête, tant l'on s'intéresse au devenir de ces trois jeunes hommes promis à un conflit historiquement meurtrier ; et, justement, voilà que The Deer Hunter nous projette violemment au sein de celui-ci, sans même crier gare... et que dire si ce n'est que l'effet est réussi ! Le contraste est d'autant plus saisissant qu'il succède à un séquence musicalement poignante, un sacré brio en somme, et la suite va nous donner raison : bien que brutalement amorcée, l'acte prisonniers / roulette russe est une claque en bonne et due forme, on est littéralement absorbé par cette lecture cruelle et impressionnante de la guerre ; et puis que dire des personnages, Michael crevant alors l'écran pour de bon et confirmant nos préalable bonnes impressions. Fait intéressant, le Viêt-Nam et le conflit en lui-même n'occupent que très peu l'image, l'intrigue ayant tôt fait de basculer de nouveau dans le décor apaisant de Clairton, ce qui souligne de nouveau l'approche du sujet opéré ici : au delà du simple film de guerre, The Deer Hunter est un récit avant tout humain, et non moins prenant, oh que non. En résumé, passé l'acte Viêt-Nam le long-métrage nous tient en son pouvoir narratif avec une aisance folle, et l'on est pendu à la suite des événements : le retour de Michael en Amérique est ainsi superbement traité, les séquelles psychologiques inhérentes à l'inhumanité du conflit ayant à jamais changé son regard sur le quotidien, d'où une réinsertion difficile. Le poids prépondérant de la roulette russe n'y est d'ailleurs pas indifférent, et exception faite de la véracité discutable d'une telle pratique en les circonstances, celle-ci est un facteur aussi marquant qu'efficace ; l'importance des protagonistes est également primordial quant à la portée du film, le fait est que l'approfondissement hautement crédible de ces derniers ne les rend que plus attachants, et donc que l'on se prend d'autant plus d'intérêt pour leur destin. Par extension, le casting fait des merveilles, et ce que l'on se penche sur le trio principal comme sur de savantes figures secondaires, bien que l'on retienne avant tout la prestation hallucinante de Robert de Niro (je n'ai pas vu Jon Voight dans Le Retour, mais il méritait clairement l'Oscar) et celle d'un Christopher Walken habité par le rôle (Oscar du Meilleur Second Rôle mérité en l'espèce). Bref, The Deer Hunter est une lecture ni plus ni moins réussie et fascinante de la Guerre du Viêt-Nam, l'optique psychologie humaine et perception du conflit par la classe ouvrière s'avérant être impressionnant ; et puis vient une dernière partie de roulette russe en tous points culte, mais aussi dramatiquement poignante, d'où une seconde claque monumentale nous laissant sur le cul (et où la portée d'un simple "One shot" nous renverse). En résumé voici un chef d'œuvre laissant une trace indélébile dans l'esprit du spectateur, fort d'un traitement étonnamment percutant (il en montre peu, mais cela suffit amplement) ; on gardera également en mémoire les diverses prestations, toutes formidables si ce n'est plus, tandis que Michael Cimino aura doté son long-métrage d'une mise en scène certes classique, mais vraisemblablement adaptée au ton réaliste ambiant. Le meilleur film sur la guerre du Viêt-Nam en somme.