Pour étudier en profondeur ce cinéaste (je n’avais jusque là vu que Fahrenheit 451), je me suis laissé tenter par ce film, même si au départ j’avais de gros a prioris, moins par le réalisateur que le sujet du film.
Eh bien voilà, merci ma connerie, car j’ai trouvé ce film absolument sublime. Un éloge de la Femme, au travers d’un acteur (que je découvrais par la même occasion) fabuleux, le tout extrêmement bien construit, et magnifique aussi bien sur le fond que la forme.
Dès le début on est accroché. Le talent de Truffaut se retrouve à différentes échelles : l’écriture déjà, exquise. Superbement bien écrit, réaliste et cru. La narration est elle-aussi d’une maitrise époustouflante : que l’on vienne à des scènes précises, ou bien à des souvenirs du héros vécus, ou simplement résumés le temps d’ellipses, à chaque fois c’est divinement bien fait. Le tout est teinté d’une certaine gravité tout de même, en témoignent l’ouverture et la fin du film, mais constamment accompagné d’humour noir, et certaines scènes sont hilarantes (comme la discussion avec la petite fille de 9 ans). On balance donc entre un côté très réaliste, dirons-nous le revers de la médaille de cet homme et ces femmes incapables de vivre dans la stabilité, et puis simplement un homme qui se rend compte de sa vie. Jamais nian-nian, toujours juste, Truffaut met en scène une histoire belle mais réaliste, avec un talent énorme. Toutes ses femmes qui défilent sous nos yeux sont autant succulentes les unes que les autres. Le scénario est aussi super : en plus de s’intéresser au quotidien de ce dragueur, on replonge dans son passé avec son livre, puis une partie de son avenir, jusqu’à cette fin assez triste, qui nuance le tout.
Si je peux être clair : le film se résume au résumé que fait l’éditrice du livre du héros (bon comprendrons que ceux qui ont vu le film hein…), et d’ailleurs c’est assez logique. Mais ça va encore plus loin, le film ne raconte pas simplement l’histoire d’un homme qui repense à son passé, on l’accompagne également dans son présent et son futur, donc voilà j’aime cette étendue. Par exemple l’histoire avec cette Aurore qui le réveille chaque matin est fabuleuse, d’ailleurs dommage qu’elle n’aboutisse pas…
Non mais que dire franchement ? De bout en bout c’est superbement bien maitrisé, on est plongé dedans, voilà on suit la vie d’un cavaleur et de toutes les femmes qui vont partager sa vie, c’est grandiose. Et certaines scènes sont vraiment splendides, je pense quand il voit un jeune couple en train de se marier, et lui pensant : «En voilà deux qui croient au Père Noël. Aujourd’hui c’est le grand amour, mais dans 7 ans elle partira ave un type ou c’est lui qui prendra une fille plus jeune. La maison sera vendue, et les enfants dispersés. ». Ou aussi au début quand il film plein de femmes, certaines célibataires, semblant attendre l’amour d’autres en couple, jeunes ou vieux retraités, et le héros dire : « Elles veulent la même chose que moi : l’amour. Tout le monde veut l’amour, toutes sortes d’amours, l’amour physique et l’amour sentimental, ou simplement la tendresse de quelqu’un qui ne regardera plus personne d’autre. Je n’en suis pas là, moi, je regarde tout le monde. ». Et la caméra qui filme chaque catégorie… Rofl ce passage est sensationnel.
Puis voilà, aussi l’intelligence de Truffaut est ne pas émettre de jugements. Le film montre tout autant de réussites que d’échecs (comme le début par exemple avec cette recherche sans queue ni tête, énorme). C’est, comme le livre, une somme de contradictions, quelque chose de réaliste. Des femmes qui recherchent quelque chose que l’homme n’a pas… Et lui qui cherche une stabilité inconsciente qui le fuit constamment… Un portrait de l’amour au 20ème siècle comme un des personnages le lui dit ?
Voilà entre légèreté (grâce profonde avec ces plans au début où l’on voit toutes ces magnifiques créatures en jupes se déhancher) et gravité (comme la fin), un film d’une beauté et d’une réalité émouvantes, un portrait de l’amour presque banal dressé par Truffaut, le résultat est saisissant, tantôt drôle tantôt grave, c’est une pure merveille.