As bestas signifie EN GALICIEN et non en espagnol ou castillan les bêtes.
Olga et Antoine, couple de français sont venus s'installer en Galice où ils vivent de la culture de légumes selon le rythme des saisons et de la terre, sans engrais ni autres outils de l'agriculture intensive et retape des maisons laissées à l'abandon dans l'espoir de faire revenir des gens pour repeupler cette Galice désertée. Une société norvégienne a proposé aux habitants de leur village d'installer des éoliennes, installation qui donnera lieu à une compensation financière. Antoine s'oppose à ce contrat en refusant de le signer et en réussissant à convaincre 3 autres habitants du village. 3 contre, 6 pour. Statu quo, les éoliennes se font attendre. Sauf que la position affirme d'El Francès, Antoine, a attisé et fait ressortir la colère et la haine des 6 pour notamment des frères Xan et Loren. Une guerre de voisinage s'enclenche.
Comme dans la lignée de ses films précédents (notamment El reino et Que Dios nos perdone) R. Sorogoyen nous plonge dans une atmosphère de thriller avec une pression et un suspens qui monte lentement mais sûrement. Par ailleurs, en fixant son histoire en Galice, cette région souvent qualifiée la plus pauvre d'Espagne et la plus reculée (lire les œuvres de R. de Castro, grande figure littéraire galicienne), avec ses villages, ses habitants installés depuis des lustres et sa désertification, ses paysages de petites montagnes, sa langue et culture (comme les Basques ou les Catalans, la Galice est une culture à part entière, tellement à part entière que jusqu'au milieu du XIXème siècle existait au sein du royaume d'Espagne une royauté de Galice), il livre une ambiance inquiétante, poisseuse, difficile. Du coup, la discorde sérieuse de voisinage, base du scénario, est vraiment bien revisitée, remaniée. Il y a une recherche de réalisme, de détails, de subtilité dans la réalisation, les décors, l'histoire. Le fait de tourner en grande partie en galicien (langue parlée notamment entre les 2 frères) apporte un réel souci d'ancrage dans la région.
Mais, mais personnellement connaissant très bien la Galice du côté espagnol (d'ailleurs j'ai reconnu pas mal d'endroits filmés dans le film) et du côté portugais (la frontière luso-espagnol d'où est originaire ma famille) il y a des trucs, des choses qui m'ont gêné voire déplu.
Les maisons et les décors correspondent bien à la réalité de la région. Mais la Galice a pas mal bénéficié des subventions européennes et beaucoup de Galicien.nes ont pu moderniser leurs villages et par la même leurs habitats. Le café où les protagonistes se rendent est franchement exagéré dans son aménagement et décor. Ensuite, l'histoire des éoliennes a été effectivement source de débats et de discussions dans cette région. Et ce n'est pas fini. Cependant, le film ne montre pas suffisamment ces discussions, les pour et les contre. On peut déplorer l'installation de ces engins mais il faut mettre plus que les compensations financières distribuées aux habitants sur la table. Il y aussi tout l'aspect d'approvisionnement en électricité dans la région, source de continuité de modernisation. On a l'impression que Xan et Loren veulent ses éoliennes que pour l'argent pour améliorer leurs conditions.
L'interprétation : perso' je n'aime pas M. Foïs, je la trouve arrogante, manquant d'humilité et très bobo. Elle tourne en rond dans son jeu. Et inintéressante à mes yeux. Mais là pour le coup, sa personnalité insupportable et sa suffisance ont bien servi son personnage de citadine qui joue aux Marie-Antoinette modernes. Impeccable dans le rôle. D. Menochet est bien mais la transmission de sa soi-disante affection de la région n'est pas bien jouée.
Et d'ailleurs lors de la confrontation avec Xan au sujet des éoliennes, du village et de la région, il est très, très en-dessous de l'acteur espagnol qui lui répond que lui il vit là depuis 52 ans, sa mère 73 et que Antoine est arrivé du jour au lendemain.
L'interprétation tient surtout aux acteurs espagnols, dont beaucoup s'expriment dans un galicien nickel.
Dans l'ensemble c'est un bon film. D'aucuns regrettent une seconde partie plus mollassonne, moins oppressante. Peut-être personnellement mais je trouve qu'il y a un équilibre entre les deux. Thriller à voir.