La guerre du Viêt Nam au cinéma, c'est une pléiade de films dont quelques uns cultes, et parmi ces cinéastes nous ayant transporté avec brio au sein de ce conflit meurtrier se trouve un certain Oliver Stone, auteur d'une trilogie sur le sujet ; Platoon l'inaugurait en 1987, et l'on peut dire que le réalisateur ne manqua pas le coche en signant là une œuvre référence, n'ayant peu ou rien à envier aux ténors du genre (Apocalypse Now pour ne citer que lui). D'ailleurs, tandis que Martin Sheen crevait l'écran sous la direction de Francis Ford Coppola, son troisième fils obtint le rôle principal de Platoon, à savoir le jeune et idéaliste Chris Taylor ; et bien que n'égalant pas la performance paternelle mémorable, Charlie Sheen s'en sort de façon plus qu'honorable en livrant une prestation crédible fort réussie, tout en ayant surmonté la préparation intensive prodigué par un Oliver Stone autoritaire. Sur ce point rien de surprenant, dans la mesure où ce dernier attachait une importance de premier ordre à la concrétisation de son projet, celui-ci s'inspirant en grande partie de sa propre expérience de soldat volontaire au Viêt Nam ; on peut donc dire que Platoon est fort convaincant de par son réalisme, l'immersion étant assurée au gré d'une ambiance oppressante, couplée à un scénario sans fioritures mais non moins captivant. Comme tout bon film ayant abordé la question, Platoon ne manque pas de dresser un tableau pessimiste et éloquent de la croisade américaine contre le communisme en Asie, celui-ci s'imprégnant d'une folie ambiante gagnant chaque protagonistes, y compris l'utopiste Chris, peu à peu transformé au fil du récit ; là où le long-métrage s'avère franchement captivant, c'est justement concernant l'évolution de dernier, tiraillé entre son admiration pour deux sergents que tout oppose, à savoir le brutal et impressionnant Barnes (campé par un Tom Berenger parfait) et l'attachant et charismatique Elias (Willem Dafoe est mémorable). Bien qu'il n'y ait rien d'extraordinaire en termes de rebondissements, Platoon maintient un suspense délectable tout en usant savamment de l'horreur croissante habitant son sujet, et ne manque pas de nous tenir en haleine au fil de séquences tendues à souhait (celle du village tout particulièrement) ; la narration de Chris structure enfin pour le mieux la trame, tout en approfondissant le personnage, ce qui au travers d'un propos travaillé et critique fait lorgner le film du côté des classiques du genre... ce qu'il est indubitablement. Pour le reste, on note la présence d'une BO tout bonnement magnifique, conférant alors à Platoon une dimension tragique d'autant plus efficace, tandis que l'on est plus nuancé concernant le plan purement graphique : compte tenu d'un budget relativement faible (6M de dollars), le long-métrage a pour le moins vieilli et présente des faiblesses d'ordre visuel, à l'image de fusillades fouillis et peu satisfaisantes (le bombardement final en est également un bon exemple). En résumé Platoon est une œuvre indispensable, car foutrement réaliste et culte au possible (bien que fort théâtrale,
la mort d'Elias
est en tous points inoubliable), mais aussi divertissante et brillant d'une portée historique non négligeable, énième précieuse représentation d'une guerre dans toute sa splendeur et sa cruauté.