Un Chêne qui laisse de bois
Alors que l'affiche et la bande annonce présagent d'une élégie à la nature ayant un chêne majestueux comme point focal, le film trahit dès ses premières images la médiocrité, la pauvreté de son approche par les auteurs, Michel Seydoux et Laurent Charbonnier.
Rien ici ne se rapporte à la nature sauvage, au hasard faisant advenir ou pas les bêtes, tout est truqué sauf le chêne, et encore, je ne suis pas sûr qu'il s'agisse du même du début à la fin.
Le cinéma animalier se partage entre deux écoles : l'immersive et la re-création. À la première se rattachent les chefs d'oeuvre que sont par exemple, La Panthère des neiges, de Sylvain Tesson et Vincent Munier, et les travaux sur les loups de Jean-Michel Bertrand, authentiques plongées au coeur de la nature sauvage, en complète autarcie, laissant au hasard et aussi à la science du pisteur le soin de saisir les animaux, au besoin à l'aide de pièges photos.
On rangera aussi dans cette catégorie noble les films produits par Jacques Perrin qui, s'ils introduisent un dispositif cinématographique au sein d'univers animaliers n'en modifient pas le comportement. À la seconde, Le Chêne.
Michel Seydoux et Laurent Charbonnier ont été guidés au départ par une idée originale et sur le papier plutôt bienvenue : se passer de commentaires, laisser parler la nature, confier le scénario aux seuls acteurs légitimes dans un tel projet, les animaux, les sons qu'ils produisent, le souffle du vent, la colère de l'orage.
Ce postulat validé, ils ont recréé en studio tout le reste, scénarisant le comportement animal au point de générer un anthropomorphisme insupportable. On voit un couple de geais à peine moins cabotins que deux vieux du Muppet Show, les balades vite ennuyeuses d'un écureuil témoin, la chasse d'un autour vue par ses yeux, une couleuvre filmée comme un boa rampant vers deux oisillons qui seront sauvés in extremis du massacre par la rupture de la branche sur laquelle elle progressait ; on frise là le ridicule. Sans parler du terrier où se cache une famille de mulots, éclairé comme le plateau de Danse avec les Stars.
Du cinéma putassier qui méprise tant la nature qui mérite mieux que le public, pris au piège de la joliesse des effets spéciaux et ne réfléchit pas plus loin que le bout de son Magnum au chocolat, à en juger par l'accueil dithyrambique qu'il fait au film. Dommage.