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    Yves G.
    Yves G.

    1 496 abonnés 3 513 critiques Suivre son activité

    1,0
    Publiée le 26 novembre 2024
    Shahin est un jeune réfugié iranien qui au péril de sa vie a quitté son pays à la recherche d’une vie meilleure en Occident. Les réalisatrices l’avaient rencontré plein d’énergie et d’espoir, à l’aube d’une vie nouvelle, en Grèce en 2016 après qu’il avait réussi à traverser clandestinement la mer Égée. Un an plus tard, elles le retrouvent dans le Nord de l’Angleterre, qui se morfond dans l’attente fiévreuse d’un titre d’asile.

    Il y avait mille façons de documenter l’odyssée de Shahin et sa longue attente dans un centre d’accueil anglais. Celle de Michael Winterbottom dans "In This World" (2002) ou, plus récemment celle de Ben Sharrock, dans "Limbo" (2020) une fiction qui documentait la vie vide de réfugiés moyen-orientaux ou africains assignés à résidence dans les Hébrides écossaises dans l’attente du traitement de leur demande.

    Le parti pris par les deux réalisatrices, Vivianne Perelmuter et Isabelle Ingold, est original. Elles sont allées dégotter sur Internet des videos de télésurveillance, au grain grossier, filmant en d’interminables plans fixes des lieux anomiques : parkings, routes, supérettes….
    Elles y ont ajouté le texte des SMS échangés avec Shahin pendant sa longue réclusion, l’enregistrement de ses échanges téléphoniques avec sa mère, à laquelle il cache une partie de la réalité, et la reconstitution de ses interrogatoires par la police britannique, qui essaie de débusquer les incohérences de son récit.

    Le résultat est paradoxal. Clarisse Fabre du Monde, enthousiaste, parle d’une « œuvre godardienne hantée par le dessin, la photographie, la peinture ». Je serais moins dithyrambique. Je comprends volontiers le parti pris radical du refus d’une illustration sursignifiante du parcours d’un réfugié, déjà mille fois filmé. Mais je n’ai pas été convaincu du choix de ces videos anonymes et glaciales. Outre leur manque revendiqué de beauté, se pose très vite la question de leur choix : pourquoi telle vidéo et pas telle autre ? à ce moment du film ? ou à celui-ci ? Sans doute ces choix ont-ils été mûrement réfléchis par les réalisatrices. Mais très vite, comme souvent face à l’incompréhension que suscite l’art contemporain chez les béotiens comme moi, perce le soupçon du grand-n’importe-quoi sinon du foutage de gueule.
    Aurégane Lemière
    Aurégane Lemière

    14 abonnés 67 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 8 mai 2022
    « Ailleurs, partout » est un film documentaire expérimental racontant l’expérience de Shahin, un jeune iranien réfugié en Europe à l’âge de 20 ans, que les réalisatrices, Isabelle Ingold et Vivianne Perelmuter, ont rencontré en 2016. Nous y entendons par bribes les enregistrements de son interrogatoire à son arrivée en Angleterre, ainsi que ses conversations téléphoniques avec sa famille, sa mère notamment.
    Les réalisatrices nous invitent ici à questionner la notion de liberté. Elles nous confrontent, avec beaucoup de justesse, à l’absurdité de notre monde. Comment peut-on se sentir libres dans un univers saturé de règles, de frontières entre pays et de contrôles d’identité ? Shahin rêve de voyage. Il veut voir le monde entier, mais se retrouve sans cesse enfermé. Il est curieux, il veut faire des études. Il est de nouveau empêché ; il n’a pas de carte d’identité, il se voit refuser l’accès à l’université. Un obstacle de plus dans sa volonté de vivre.
    Selon lui, les jeunes iraniens sont totalement coupés du monde, à cause des frontières et de la religion notamment. La seule possibilité d’ouverture qu’ils ont, c’est internet. En Angleterre, Shahin n’a pas le droit de travailler. Il se retrouve cloîtré dans une chambre à regarder des vidéos tout au long de la nuit. Il s’agit d’une observation simple, décontextualisée, extérieure et hors du temps – il s’adonne à ces visionnages la nuit afin de ne pas voir le jour défiler. Il évoque à ce moment-là son rapport aux images ; quand il voit des images virtuelles, cela ne lui suffit pas à s’imprégner de l’ambiance d’un pays, d’où son envie de voyage. Une image est « froide », elle ne transmet pas l’atmosphère, les bruits, les odeurs, les tensions.
    Le point de vue de Shahin sur l’efficacité des images est particulièrement pertinent pour le spectateur qui est justement en train de faire l’expérience contraire. Le film propose une accumulation d’images brutes, des images de caméra de vidéo-surveillance en majorité, couplées à des conversations en voix-off ainsi que des échanges de textos. Le spectateur procède très vite à des associations d’idées ; il écoute la conversation en cours et cherche à créer un lien avec l’image qu’il a sous les yeux qui est pourtant totalement décorrélée du discours. Le contraste entre les images de vidéo-surveillance, tout à fait impersonnelles, et l’intimité des échanges en voix-off, accentue l’émotion ressentie par le spectateur. Nous faisons inconsciemment des rapprochements d’idées visuelle et sonore tout au long du film. Ces analogies permettent de récréer dans nos esprits le voyage du jeune iranien. Cette immersion est particulièrement performante car elle ne procède que par images mentales. Le cheminement est hors-champ, individuel et intérieur.
    Par son incroyable inventivité formelle, ce film fonctionne terriblement bien. Les réalisatrices proposent avec finesse et intelligence une véritable expérience de pensée. Cette mise en perspective de ce que peut vivre un immigré au cours de son transit, « est une immersion, une expérience physique qui force à imaginer et permet de ressentir ce par quoi Shahin est passé, les états intérieurs qu’il a traversés autant que les états géographiques » (« Derives », https://www.derives.be/films/ailleurs-partout).
    Aurore CLAIRE
    Aurore CLAIRE

    1 critique Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 1 janvier 2022
    Magnifique voyage ! Et si étonnant. Impression d'une première fois. En renouvelant l'approche d'un réfugié, c'est nous-mêmes qui bougeons, qui l'accompagnons intimement, et depuis son vécu, on regarde à nouveau le monde. A ne pas manquer !
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