Pour bousculer leur quotidien, Kath et son compagnon Max ont loué un chalet aménagé au fin fond des bois. Après une longue route, ils ont la mauvaise surprise de découvrir qu'un autre couple occupe déjà les lieux. N'ayant pas envie de rebrousser chemin en pleine nuit, ils acceptent la proposition des premiers arrivants de cohabiter sous la même toit jusqu'au matin. Épuisée, Kath part se coucher seule, laissant Max en compagnie du couple. À l'aube, elle découvre la maison vide...
Le moins que l'on puisse dire c'est que, même avec tous les efforts du monde, "Gone in the Night" met vraiment à mal notre suspension consentie de crédulité envers les événements de son point de départ. Là où un "Barbare", sur un postulat très similaire de quiproquo de location, instituait un brillant climat de méfiance crédible entre ses personnages en s'amusant avec les a priori d'une telle situation, le film d'Eli Horowitz fait à peu près tout le contraire. Ici, ses héros ne semblent en effet pas se poser la moindre question sur les occupants de leur petit chalet (Winona Ryder fronce quand même un peu les sourcils) alors que tout, mais absolument TOUT, de leurs tenues à leurs comportements en passant par leurs mots, devrait leur faire craindre le pire. Un prétexte vient même leur faire livrer sans broncher une partie de leur intimité à ces parfaits inconnus qui ne cessent de se montrer toujours plus étranges. Et, lorsque Kath constate la disparition de Max le lendemain, c'est sans difficulté qu'elle accepte la première explication venue avant de repartir poursuivre sa vie.
De la part du co-créateur d'une série comme "Homecoming" (que l'on vous recommande), on reste bouche bée devant tant de facilités et on peine de fait à avoir la moindre empathie pour une héroïne aussi naïve -pour ne pas dire plus- qui commence tout de même à s'interroger sur les événements une semaine plus tard.
Évidemment, au fil de sa durée, "Gone in the Night" va chercher peu à peu à nous faire relativiser cette introduction incongrue en nous la faisant voir sous un nouveau jour. Mais, là encore, si des éclaircissements vont venir pendant un temps titiller notre curiosité sur l'étrange machination qui se cache derrière tout ça, le film ne va cesser d'enchaîner les maladresses et les grosses ficelles narratives jusqu'à nous donner trop souvent un coup d'avance sur des révélations qu'il voudrait renversantes.
Ainsi, malgré les efforts de Winona Ryder, rien ne va s'arranger quant à notre ressenti vis-à-vis de Kath, cette femme qui cherche à sortir de son embourgeoisement en se soumettant aux désidératas de son petit ami adulescent caricatural pour, peu après la disparition de ce dernier, tomber dans les bras de Ryan, un homme qui incarne bien entendu son parfait contraire, mature et attentionné. D'ailleurs, le personnage de Dermot Mulroney paraît également tout aussi improbable en néo-love interest placé idéalement sur sa route, jamais très occupé et toujours défini par des circonstances dramatiques (on a envie de faire des "Awwww" compatissants avec Winona Ryder à chaque fois qu'il ouvre la bouche) ou le hasard t.très forcé d'une rencontre avec un ancien collègue pour l'obliger à parler de son passé.
Dans le sillage de ce duo improvisé d'enquêteurs et de flashbacks, les finalités autour du mystère de la disparition de Max vont donc tout de même intriguer un minimum, trouver une forme de symbiose cohérente avec les motivations existentielles mises en avant de ses protagonistes principaux, tous bridés par une part commune de leur condition à laquelle ils cherchent désespérément à échapper, mais, comme on le disait, aux portes du dernier acte, faute d'une grande subtilité, une large part du brouillard entretenu par "Gone in the Night" se sera bien plus vite dissipé pour le spectateur que pour son héroïne pas très perspicace.
Heureusement, dans l'emballement de ces ultimes instants, le film va se parer d'une belle ironie mordante grâce à quelques retournements de situation donnant enfin un peu de folie à l'ensemble et, même si quelques maladresses gouvernent encore les agissements désespérés de Kath, "Gone in the Night" trouve la meilleure des portes de sortie symboliques à lui offrir pour la faire grandir dans une noirceur salvatrice. Ce ne sera peut-être pas suffisant pour sauver le long-métrage mais ces derniers instants auront eu le mérite de montrer que la patte d'Eli Horowitz a du potentiel au-delà de "Homecoming" si, bien sûr, elle est à l'avenir bien plus maîtrisée et habile qu'ici. On retiendra également la prestation de Brianne Tju qui, après la série "Souviens-Toi L'Été Dernier" ou le film "Inhuman", s'impose comme une jeune pousse très prometteuse dans le cinéma de genre.