J’ai rencontré le cinéma de Quentin Dupieux avec le Daim qui m’avait beaucoup amusé…j’avais moins aimé Incroyable mais Vrai et je m’attendais à tout avec Fumer fait Tousser … Le cinéma de Quentin Dupieux ne rentre toujours pas dans une case bien définie si ce n’est celle qu’il s’est lui-même créée. Le réalisateur continue de se faire plaisir en investissant à sa manière les influences cinéphiles qui lui sont chères, et le fait avec l’entrain d’un sale gosse particulièrement communicatif.
Depuis Le Daim, Quentin Dupieux avait pour habitude de partir d'un argument scénaristique improbable et de le développer avec une logique implacable dans un environnement tout ce qu'il y a de plus réaliste. Avec Fumer fait Tousser on peut oublier cette structure narrative. Une bande de justiciers, appelée les TABAC FORCE, se bat contre une tortue démoniaque qu'elle arrive à faire exploser en lui pulvérisant de la fumée de nicotine dessus (quand on vous dit que le tabac tue). C'est un monde normal ici, dans ce film. Un monde dans lequel un chef des justiciers est une marionnette de rat, avec un liquide vert dégueu lui sortant constamment de la bouche, ce qui ne m’empêche pas de lever des super nanas !!! On restera vague sur le scénario pour ne pas ôter le plaisir de la découverte en en divulguant un peu trop, car c'est sans cesse surprenant, sans cesse prenant
Donc, c'est un film sur une bande de justiciers qui va essayer de vaincre un grand méchant voulant détruire la Terre ? Le tout entrecoupé d'histoires, racontées chacune par un personnage différent. Des histoires bien saignantes, bien gores, durant lesquelles l'humour l'emporte sur l'horreur par le biais d'un absurde dont le curseur poussé à son maximum. Enfin, sauf une, celle narrée par la petite fille, à base d'écologie, qui est selon tout le monde la plus terrifiante. Parce qu'elle pourrait arriver chez nous (chez nous, là, dans la réalité réelle !) sans avoir besoin de changer le plus petit élément. Les histoires de fiction ne parviendront jamais à être aussi glaçantes que les histoires vraies ou, du moins, vraisemblables. Et le grand méchant qui veut détruire la terre ne pourrait même pas en avoir besoin tant elle se détruit elle-même
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On entre dans la quatrième dimension de Quentin Dupieux, un univers parallèle totalement déjanté, reconnaissable entre tous qui attire toute une pléiade d’acteurs …Gilles Lellouche après Jean Dujardin, Anaïs Demoustier, Dora Tillier, Vincent Lacoste et même Benoit Poelvoorde en invité pour incarner le méchant Zélardin… c’est totalement décalé, avec une esthétique des années 70…C’est allègrement absurde mais plus c’est gore plus on rit !!!
Et pourtant il peut y avoir de la profondeur, la question de l’écologie, la peur d'être seul(e) face à ses propres pensées (en gros, d'être seul(e) avec soi-même !), la machine qui broie l'être humain, notre dépendance à la technologie. Bref, dans tout ce délire jouissif, derrière toute cette absurdité, se dissimule une angoisse sourde sur notre condition, sur notre futur, à nous, êtres humains évoluant dans un univers qui n'est pas celui d'une fiction. Oui, quand on gratte un peu, on s'aperçoit que Dupieux a un cinéma assez déprimant, l'air de rien. J’ai beaucoup aimé…et puis si on n’aime pas l’humour potache, cela ne dure que 80 minutes !!!